Très bien. Mais pour qu'une action soit sans regret, encore faut-il être sûr du bénéfice. Or il existe toute une série d'actions qui, même si le réchauffement climatique ne se produisait pas, auraient des effets bénéfiques immenses pour toute la société et les écosystèmes. Mais on ne les prend pas en compte, et c'est bien le coeur du problème. On en reste à des essais, des démarches ponctuelles.
Pour intégrer cette dimension, il faut un leadership. Votre Président a déjà montré qu'il pouvait y prétendre ; il va falloir accélérer un peu le rythme d'ici à la COP21, mais la France a l'opportunité de prendre ce leadership. En effet, à la différence d'autres pays européens comme le Royaume-Uni, l'Espagne ou le Portugal, la France est dans une situation unique en ce qu'elle est présente partout grâce à ses outremer. Du coup, vous avez une responsabilité globale en montrant ce que vous pouvez faire dans vos outremer et diffuser des bonnes pratiques dans les zones alentour.
Malheureusement, certains de vos schémas de développement ne constituent pas à proprement parler des modèles : ainsi, j'ai été surpris en découvrant que la population de La Réunion atteignait presque le million d'habitants, ce qui ne peut que poser de gros problèmes dans une île aussi petite. C'est toute la question de la croissance et de la poursuite de cette croissance.
Pour apprécier les utilisations des écosystèmes, il faut un accounting system, un système comptable qui prenne en compte non seulement les gouvernements, mais également les entreprises : l'UICN travaille actuellement avec le World Business Council for Sustainable Development – Conseil mondial des entreprises pour le développement durable – sur un protocole appelé Natural Capital – « Capital Naturel » – visant à développer une approche intégrée dans la gestion de l'entreprise. Pour l'instant, soyons honnêtes, 99 % des actions relèvent du simple « verdissement » : on fait un petit quelque chose à côté juste pour montrer qu'on est très vert. Mais c'est un essai : nous sommes très contents que le WBCSD soit avec nous et que le message commence à passer.
Autre aspect de l'intégration : quand il est question d'infrastructures « dures », bâtiments, routes, etc., ce n'est jamais vu comme un coût, mais comme un investissement. Mais sitôt qu'il s'agit de mesures en direction de la nature, qu'il faille protéger ou restaurer, c'est toujours considéré comme un coût !
Jean-François Lambert. Tout à fait !