Intervention de Jean-Louis Touraine

Réunion du 28 janvier 2015 à 16h30
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Touraine, député, co-rapporteur :

Étant donné l'éloignement des positions initiales, nous avons été agréablement surpris par le climat dans lequel se sont déroulées les deux tables rondes. Les uns faisaient état d'effets adverses des vaccins considérables et sous-estimés. Les autres rappelaient leurs bienfaits indiscutables, et estimaient excessives les réserves émises par les opposants. Les tables rondes sont parvenues à faire dialoguer ces parties. Le débat s'est maintenu dans le domaine rationnel du rapport entre l'efficacité et les effets adverses.

L'ensemble des intervenants a consenti à ce qu'il n'y ait pas de remise en question du bienfait évident en santé publique et individuelle des vaccinations largement répandues. De même, ils ont accepté la possibilité d'effets adverses à ne pas négliger, en étant conscients de la nécessité de mieux les identifier afin d'en approfondir l'étude.

La première table ronde portait sur les effets des adjuvants vaccinaux, en interrogeant la communauté scientifique, puis un panel d'acteurs plus élargi. Rapprocher le dialogue entre les adversaires et les défenseurs de cet adjuvant a été fructueux.

Le point de vue des adversaires de l'utilisation de l'aluminium dans les adjuvants a notamment été développé par le Professeur Romain Gherardi de l'hôpital Henri Mondor à Créteil. Il fait état dans les biopsies de la présence d'aluminium au niveau du site de l'injection quatorze ans après l'administration d'un vaccin. Contenu à l'intérieur des macrophages, l'aluminium peut migrer au niveau cérébral. Les conséquences de cette présence d'aluminium peuvent être le développement d'une pathologie baptisée la myofasciite à macrophages. La définition des caractères cliniques de cette maladie est confuse, puisque les symptômes sont relativement courants : douleurs musculo-articulaires, troubles cognitifs, asthénies. Une symptomatologie qui peut être provoquée par de nombreuses autres pathologies. Pour autant, ces symptômes pourraient être en relation avec cette administration d'hydroxyde d'aluminium comme adjuvant.

Les défenseurs ont quant à eux indiqué que la plupart des vaccins étaient inopérants sans adjuvants. Déjà un élève de l'Institut Pasteur, M. Ramon avait démontré l'inefficacité du vaccin contre la diphtérie avec l'anatoxine diphtérique seule, le simple ajout d'hydroxyde d'aluminium le rendant performant. Il en avait été de même pour le vaccin antitétanique. Si bien que l'hydroxyde d'aluminium était considéré à l'époque comme indispensable à l'efficacité des vaccins.

Il est curieux de constater que de nombreuses décennies plus tard, un tel postulat persiste. En définitive, peu d'études recherchent d'autres possibilités d'adjuvants ayant une efficacité comparable. D'autres adjuvants sont utilisés chez l'animal, mais ne peuvent être administrés chez l'homme. Des propositions ont été faites sur la recherche de nouveaux adjuvants, mais elles n'ont pas été suffisamment poursuivies, si bien que l'hydroxyde d'aluminium demeure aujourd'hui l'adjuvant utilisé le plus couramment.

Face à cette multiplicité des points de vue, il importe de ne pas accepter a priori la totalité des arguments des parties. Il ne s'agit ni de jeter le discrédit sur les vaccins du fait des adjuvants, ni de laisser dire des choses fausses sur les pathologies provoquées par l'aluminium, mais bien d'encourager les recherches dans ces deux domaines.

En effet, un échange pendant le débat a mentionné les démences et autres encéphalopathies avec troubles neurologiques provoquées par de grandes quantités d'aluminium dans le cerveau humain. Il est vrai que l'on peut en déceler des quantités considérables dans le cerveau de personnes dialysées avec de l'eau riche en aluminium, provoquant d'importants troubles neurologiques. Néanmoins, les doses administrées comme adjuvants sont infiniment inférieures. La quantité susceptible de migrer du point d'injection d'un vaccin au niveau cérébral est encore beaucoup plus faible. De sorte qu'on ne peut comparer les conséquences provoquées par les sels d'aluminium comme adjuvants vaccinaux avec des pathologies provoquées par des facteurs à doses considérablement supérieures.

Il n'empêche que des pathologies mineures telles que ces troubles associés à la myofasciite à macrophages méritent d'être étudiées et singularisées, afin qu'elles puissent sortir de la confusion actuelle.

À l'instar des maladies auto-immunes, il importe de mener des études épidémiologiques rigoureuses, pour pouvoir affirmer ou non une causalité liée à l'administration de vaccins. En effet, de nombreux vaccins sont, dans la pratique, administrés aux âges d'apparition fréquente de ces maladies. Par exemple, l'utilisation du vaccin contre le papillomavirus, administré aux jeunes filles adolescentes pour les protéger des risques du cancer de l'utérus, a été accusé de provoquer des maladies auto-immunes telles que des scléroses en plaques. Or, les études épidémiologiques démontrent une incidence équivalente d'apparition de ces maladies auto-immunes dans les groupes vaccinés et non vaccinés.

En administrant les vaccins à des âges inférieurs où la propension à apparaître de ces maladies est plus faible, les doutes légitimes relatifs aux effets néfastes des vaccins pourraient s'en trouver atténués.

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