Intervention de Bruno Sido

Réunion du 28 janvier 2015 à 16h30
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Bruno Sido, sénateur, premier vice-président de l'OPECST, rapporteur :

– Mme Anne-Yvonne Le Dain et moi-même avons aujourd'hui le plaisir de vous présenter le projet de rapport sur le risque numérique dont vous nous avez confié l'élaboration et dont la vidéo qui vient d'être projetée illustre en quelques minutes la problématique en ce qui concerne les entreprises.

C'est à partir d'une saisine de la commission des Affaires économiques du Sénat que nous avons entrepris une étude de faisabilité adoptée par l'Office le 16 avril 2014.

Cette saisine faisait elle-même suite à une journée d'auditions publiques organisée conjointement par l'OPECST et la commission des Affaires étrangères et de la Défense du Sénat au mois de février 2013. Ce jour-là, l'audition publique avait été scindée en deux parties, l'une relative au risque numérique militaire et l'autre au risque numérique civil.

Au début de nos investigations, nous comptions donc réaliser notre rapport en approfondissant la seule question du risque numérique civil. Mais il nous est rapidement apparu que, en matière de risque numérique, la distinction entre le civil et le militaire était artificielle, compte tenu justement de la nature du numérique qui est présent partout.

Au terme d'une centaine d'auditions comprenant trois journées d'auditions publiques et des déplacements à Bruxelles et en province, notamment pour visiter le centre de haute sécurité de la Direction générale pour l'armement et le laboratoire de haute sécurité de l'INRIA, vos rapporteurs ont établi une douzaine de constats sur la situation de la sécurité numérique et procédé à trois choix pour mener à bien leur étude.

Au début de celle-ci, nous avons pris soin de rencontrer le président de la commission des Affaires économiques du Sénat, M. Daniel Raoul, aujourd'hui de retour à l'OPECST ce dont nous nous réjouissons.

Nous lui avons indiqué que nous centrerions notre réflexion sur les opérateurs d'importance vitale (OIV), c'est-à-dire les entreprises dont le fonctionnement ne doit en aucun cas être interrompu, notamment du fait d'une défaillance de leur système d'information numérique.

Ces entreprises sont d'ailleurs soumises à des directives nationales de sécurité (DNS) qui leur imposent des obligations extrêmement précises que la loi de programmation militaire de 2013 a renforcées.

Après quelques mois de nos travaux, l'angle d'attaque pour aborder l'étude à partir des opérateurs d'importance vitale s'est révélé avoir été intéressant pour le raisonnement mais nous a conduit bientôt à replacer l'ensemble des activités desdits opérateurs dans la chaîne de sécurité numérique qu'ils constituent avec leurs fournisseurs, leurs sous-traitants, leurs clients et leurs personnels.

En outre, pour être tout à fait complet, au moment où le Gouvernement annonçait un ambitieux projet de loi sur le numérique, il n'a cependant pas attendu le dépôt de celui-ci pour prendre, comme déjà indiqué, dans la loi de programmation militaire, en 2013, des initiatives relatives justement aux opérateurs d'importance vitale et, d'autre part, pour élaborer, au cours de l'été 2014, des mesures relatives à la sécurité numérique concernant les administrations.

Ce qui montre que le Gouvernement, comme nous-mêmes, avons été conduits à effectuer en parallèle des analyses rigoureuses sur les différents secteurs pour finalement constater que tout se recoupe et que la sécurité numérique, voire la sécurité tout court, ne peuvent être assurées qu'à partir de mesures reliées entre elles.

Par quelque bout que l'on considère la question, il est impossible de ne pas voir dans les ramifications du numérique le système nerveux de la société et même des individus qui la composent d'où l'impossibilité de scinder artificiellement les préoccupations de sécurité en divers segments d'études.

C'est bien ce qu'ont vu, les premiers, les attaquants des systèmes numériques. À l'heure où notre pays se trouve placé sous les dispositions du plan Vigipirate à son plus haut degré – soit l'alerte attentat –, le thème d'étude de l'OPECST ne peut qu'être au coeur des préoccupations de tous les parlementaires.

Pour relever ce défi, depuis quelques années, des dispositifs ingénieux ont été imaginés et des moyens réels en hommes et en moyens ont été accordés. Par exemple, en 2009, l'Agence nationale de sécurité des systèmes d'informations (ANSSI) a été créée.

Mais, dès l'abord, je dois préciser que des dispositifs étaient déjà en place antérieurement et que, maintenant, ce n'est pas en accordant toujours davantage de compétences à l'ANSSI ni en portant, par exemple, ses effectifs de 300 à 1 000 ou à 3 000 – seuils qui ne sont d'ailleurs nullement envisagés –, qu'on résoudrait toutes les questions posées par les failles de la sécurité numérique, ni qu'on parerait à toutes les attaques dont cette sécurité est l'objet.

En effet, cette question transversale suppose l'acquisition par l'ensemble de la société d'une culture du numérique et d'une éducation initiale et continue à la hauteur des services rendus par cette technique, à la fois en dépit et en raison des fragilités qu'elle recèle.

Depuis le début de mon propos, et surtout à la suite du visionnage de la vidéo que vous venez de regarder, vous vous demandez peut-être si vos rapporteurs n'ont pas cédé à quelque alarmisme. Je vous rassurerai en disant que nous avons d'abord souhaité démontrer dans une analyse, que l'on a voulu extrêmement fouillée, le mécanisme de transmission d'un message au sein du système d'information de l'entreprise et les fragilités, souvent de conception, des matériels, des réseaux, des services et des diverses applications numériques.

Mais avant cela, nous devons lever une ambiguïté. En dépit de l'actualité sur les aspects les plus médiatisés du risque numérique et ses liens avec le terrorisme, le présent projet de rapport n'a rien d'une fresque générale ou journalistique sur le numérique où, par exemple, seraient développées des considérations sur la gouvernance mondiale de l'Internet, car il s'agit d'un rapport technique. L'OPECST produit de tels rapports directement liés aux préoccupations des entreprises que, malheureusement, le Sénat a parfois tendance à négliger. C'est pourquoi je rappelle que la commission des affaires économiques, à l'origine de la saisine, s'inquiétait de l'éventuelle fragilité des entreprises liée aux vulnérabilités des réseaux matériels, logiciels, numériques. Cela est particulièrement technique.

En qualité de membre de cette commission, j'insiste sur l'importance de cette dimension du sujet.

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