Intervention de Sébastien Raspiller

Réunion du 12 mars 2015 à 11h00
Mission d'information commune sur la banque publique d'investissement, bpifrance

Sébastien Raspiller, sous-directeur du financement des entreprises et du marché financier à la direction générale du Trésor :

Quant à l'influence de l'État sur la politique de Bpifrance, elle s'exerce dans le cadre de la gouvernance classique, à parité avec la CDC, quand il s'agit des moyens propres et du bilan de la structure. La CDC et l'État s'accordent sur un plan stratégique triennal, mis en oeuvre par la direction de Bpifrance. Si un besoin conjoncturel se fait sentir, ou au contraire disparaît, des ajustements ponctuels sont possibles.

Mais Bpifrance peut agir aussi comme opérateur et comme gestionnaire de fonds de tiers, en premier lieu de l'État, notamment pour développer des fonds d'amorçage ou des types particuliers de financement en garantie. Chaque année, à l'occasion de la discussion du budget, la problématique de l'innovation est également abordée sous cet angle. Les produits ainsi distribués portent le label Bpifrance, mais font l'objet de conventions avec l'État contenant des instructions précises.

D'autres tiers confient leurs fonds à Bpifrance de la même façon, qu'il s'agisse encore de l'État dans le cadre des PIA, ou des régions, de la CDC, de la Banque européenne d'investissement (BEI) ou même, à la marge, d'opérateurs privés. Les règles de gouvernance s'appliquent à la gestion des fonds propres, tandis que Bpifrance applique simplement, dans les autres cas, le mandat de gestion qui lui est donné.

Un partage des risques s'opère ainsi naturellement, ce qui évite les difficultés avec la CDC. Les projets soutenus par les PIA sont tendanciellement plus risqués que les projets financés sur fonds propres. D'un côté, les fonds propres sont employés en fonction du plan stratégique de Bpifrance, dans des domaines où le risque n'est pas trop élevé, hors d'une logique de subvention ; la coopération entre l'État et la CDC se fait sans difficulté, puisque les objectifs sont partagés. De l'autre côté, les donneurs d'ordres interviennent directement, par le biais de leurs instructions, dans l'activité de Bpifrance, quand ils lui confient des fonds pour développer des projets de financement ou d'investissement.

Le contrôle général économique et financier s'exerce sur Bpifrance, puisque la banque est gestionnaire d'argent public. Un commissaire du gouvernement siège dans toutes les entités de Bpifrance. Le contrôleur économique et financier veille à ce que Bpifrance remplisse ses fonctions dans le respect des intérêts publics. Des comités des rémunérations existent, tant au niveau du groupe que de ses deux filiales. La cohérence de la politique de rémunération se définit au niveau du groupe.

La création de Bpifrance a constitué un défi pour la gestion de la politique salariale au sein de l'ensemble, qui doit passer par des outils communs de gestion des ressources humaines. Or des écarts significatifs subsistent entre les deux filiales qui pratiquent des métiers différents. Dans la filiale d'investissement, un personnel en petit nombre et hautement qualifié compare ses conditions de rémunération avec le secteur privé, tandis que les standards de rémunération de la fonction publique sont appliqués dans les anciennes unités d'Oséo, comme à l'Agence nationale de valorisation de la recherche (Anvar), se situant donc à des niveaux inférieurs à ceux qui sont pratiqués dans les banques privées.

Un écart trop important de rémunération de Bpifrance Financement avec le secteur privé risquerait d'en faire partir les meilleurs éléments. Il serait au demeurant difficile de justifier, notamment pour les fonctions support, qu'un mécanisme de participation existe pour les uns et non pour les autres. Un tel mécanisme a donc été introduit à Bpifrance Financement, par un décret de la fin de l'année 2014 mais qui limite cette part variable des rémunérations à 1 % de la masse salariale. L'harmonisation des outils salariaux de gestion des ressources humaines doit ainsi permettre de créer une culture de groupe en rapprochant ses composantes, également au niveau régional.

Dans la filière investissement, le décret sur le plafonnement de la rémunération des dirigeants de groupes publics a été appliqué, ce qui a conduit à une baisse substantielle de certaines rémunérations, même si elles demeurent élevées. Il n'en reste pas moins important qu'un bon niveau de rémunération subsiste, ne serait-ce que pour faire face aux tentatives de débauchage en provenance du secteur privé. Le coefficient d'exploitation, c'est-à-dire le rapport entre les frais généraux et le produit net bancaire, s'établit ainsi à 60 %, soit un montant légèrement supérieur à celui des banques privées, parfois soumises à une pression plus forte de leurs actionnaires, mais ce montant correspond aux objectifs fixés et aux standards en usage.

Je rappelle que les deux entités n'emploient pas le même nombre de personnes, puisque la filiale d'investissement n'en emploie qu'une centaine, contre 1 800 pour l'autre filiale. C'est pourquoi le rapprochement prend du temps.

Quant à la rémunération des cadres dirigeants, elle comporte, chez Bpifrance Financement, une part variable à hauteur de 25 % de la part fixe. La réglementation bancaire prévoit que cette part peut s'élever jusqu'à 200 % de la part fixe. Même si les objectifs sont collectifs, les éléments variables et individualisés conservent leur importance pour la rémunération des dirigeants. Il n'y a pas en revanche de système de retraites à cotisations définies.

Le rapport de la Cour des comptes relatif à la rémunération au sein de CDC Entreprises contient les réponses des ministres des finances et de l'économie. Ils y rappellent que cette entreprise était détenue à 100 % par CDC, dont la commission de surveillance n'avait pas eu connaître des attributions d'actions gratuites. Or c'est dans cette instance que siège la direction générale du Trésor comme représentant de l'État. Ce sujet a été réglé, par la CDC, avant la fusion donnant lieu à la création de Bpifrance. Comme y ont insisté les représentants de l'État et ceux de la CDC, au cours des premières réunions du conseil d'administration de Bpifrance, il n'y aura pas de dispositif prévoyant, chez Bpifrance, l'attribution d'actions gratuites, et il n'y en aura jamais.

Remontant à 2007 et 2008, les pratiques de ce type, en réservant à quelques-uns un traitement privilégié, nuiraient au demeurant à l'objectif principal fixé à la création de Bpifrance, à savoir l'émergence d'une culture propre à l'ensemble du groupe.

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