C'est un dossier que j'ai suivi de près, et pour cause. Le RT 81 a été associé en permanence à la gestion de l'ordre public en amont. Il était épaulé par le service central, qui, de Paris, a interrogé tous les services de RT de France. Nous savions, par le RT 44 (Loire-Atlantique, Nantes) que certains militants de Notre-Dame-des-Landes pouvaient venir épauler leurs camarades de Sivens. Nous avons travaillé en lien avec Toulouse ou Lyon. Dans son appui au gestionnaire de l'ordre public, le renseignement ne s'est pas limité au seul service du RT local. À plusieurs reprises, j'ai envoyé sur place des agents des services de la recherche et de l'appui, afin d'identifier des militants, pendant toute la période où des violences ont été perpétrées sur le terrain.
La difficulté était double. D'une part, il s'agissait d'un mouvement très récent. Le phénomène des zones à défendre a commencé avec Notre-Dame-des-Landes. Il prend de l'ampleur. Nous avons vu certains militants naître à l'action. Nous nous sommes familiarisés avec eux grâce à la veille sur Internet et les réseaux sociaux.
D'autre part, le travail sur le site de Sivens était difficile pour des raisons géographiques. Lors de manifestations particulièrement violentes, j'ai donné consigne aux gens des renseignements de se tenir en arrière, ce qui compromettait l'observation directe. Il est plus simple de suivre les événements en ville, dans un cortège, qu'en rase campagne.
Loin de considérer qu'il y a eu défaillance, je pense que notre service a anticipé les différents mouvements. À un moment donné, nous avons connu une situation de quasi-guérilla. Il ne s'agissait non d'une manifestation, car il n'y avait ni autorisation ni parcours, mais d'un combat pied à pied sur un terrain ouvert, en milieu rural.