Intervention de Alain Tourret

Réunion du 10 avril 2015 à 9h00
Groupe de travail sur l'avenir des institutions

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Tourret :

Le mode de scrutin est essentiel et les radicaux y ont toujours porté le plus grand intérêt. En théorie, tout est simple : nous nous trouvons dans un système bipartisan et le scrutin majoritaire uninominal à deux tours assure une majorité, quand le scrutin proportionnel assure la représentation de l'opinion. Or tout a explosé. D'abord, nous nous orientons vers le mandat unique, dont l'incidence sera considérable puisque le scrutin uninominal est lié à la présence du député sur le terrain. L'élimination des maires de l'Assemblée, j'y insiste, aura des conséquences très importantes. Ensuite, le bipartisme a explosé à la faveur d'un nouveau tripartisme. Soit ce dernier subsistera en tant que tel, soit il aboutira à la disparition de l'un des trois partis – mais lequel ? Le Front national, l'UMP ou le Parti socialiste ? À mes yeux, l'un des trois va disparaître. Ainsi, au Royaume Uni, on l'a dit, les conservateurs ont « mangé » les libéraux. L'UMP a autant de probabilité que le Parti socialiste de disparaître – ce qui ne peut que les interpeller l'un et l'autre.

Quant au Front national, soit il stagnera et le scrutin en vigueur assurera un succès extraordinaire à l'UMP, soit il continuera sa progression et, du fait du scrutin majoritaire, il y aura un déclic car, avec 35 % des voix au premier tour, le risque qu'il obtienne une majorité absolue de sièges en 2017 est réel. En effet, tout une partie des voix de l'UMP sera alors absorbée par lui. Dans ce contexte, le scrutin majoritaire représente un danger colossal pour la République. Dès lors, qu'on le veuille ou non, le scrutin proportionnel est de nature à limiter les ambitions du Front national.

Dans cette dernière hypothèse, le scrutin proportionnel doit s'exercer à l'échelon non départemental mais régional, seul cadre dans lequel le parti socialiste pourra faire autour de lui l'union des communistes, des verts et des radicaux. Des majorités d'idées devront être définies autour de la droite et de la gauche républicaines. Il convient de trouver des thèmes de manière à dégager une majorité, par ce scrutin, autour du Président de la République.

On prétend que la proportionnelle rend le pays ingouvernable ; c'est oublier que, jadis, le Président de la République n'était pas élu au suffrage universel direct. C'est pourquoi un scrutin mi-chèvre mi-chou, qui ferait élire à la proportionnelle une centaine de députés, ou même deux cents, ne rimerait à rien ; son instauration obligerait en outre à redécouper les circonscriptions, ce qui serait politiquement délicat. De deux choses l'une, donc : soit on garde le scrutin en vigueur et la gauche se retrouvera en miettes, soit on applique le scrutin proportionnel dans le cadre de circonscriptions régionales.

1 commentaire :

Le 05/05/2017 à 10:11, Laïc1 a dit :

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"Dès lors, qu'on le veuille ou non, le scrutin proportionnel est de nature à limiter les ambitions du Front national."

Pas du tout, suite aux derniers sondages pour les législatives de 2017, les projections en siège pour le FN avec le scrutin majoritaire lui donnent de 25 à 35 députés, alors qu'il fait pourtant près de 21 % à la présidentielle, imaginez le nombre de députés que ce parti ultra-violent aurait avec le scrutin à la proportionnelle ?

M. Macron a dans l'idée de remettre la proportionnelle pour les législatives, il ferait là la plus grosse bêtise politique de sa vie. On ne peut pas prétendre lutter contre l'extrême droite en répétant les erreurs du passé et en lui facilitant la tâche.

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