Intervention de Yves Jégo

Réunion du 16 avril 2015 à 9h30
Commission spéciale pour l'examen du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYves Jégo :

En matière d'effacement, l'étude de l'ADEME n'est pas claire, puisqu'elle évoque des économies pouvant atteindre 6 à 7 % pour le particulier. Même si une facture moins élevée n'est pas négligeable pour les 7 millions de logements chauffés à l'électricité, l'intérêt de l'effacement est ailleurs. Il évite d'avoir à acquérir des mégawatts sur le marché – dont le prix de l'unité peut monter jusqu'à 3 000 euros ! –, et surtout il évite d'avoir à réactiver les centrales à charbon ou des dispositifs gros émetteurs de CO². À ce jour, grâce à votre action, monsieur le président, 500 mégawatts sont effacés dans notre pays, ce qui signifie que deux centrales à charbon ne fonctionnent pas.

Les opérateurs estiment que le nombre de foyers équipés du boîtier d'effacement peut atteindre un million, contre 100 000 aujourd'hui ; les 500 mégawatts effacés pourraient ainsi devenir 5 000. Cette montée en puissance nécessite 600 millions d'euros d'investissement et peut créer 2 500 emplois. Sans compter que la technologie française figure parmi les meilleures du monde. Elle pourrait s'exporter en Chine et dans d'autres pays où l'effacement pourrait s'avérer utile, mais elle doit d'abord s'implanter sur son marché local.

En matière d'effacement, ce qui fait débat, c'est la rémunération. Divers systèmes ont été imaginés, reposant sur le principe que l'effaceur verse une somme au fournisseur pour compenser l'énergie que celui-ci aurait dû facturer, somme qu'il récupérerait sous forme de prime financée soit par la contribution au service public de l'électricité (CSPE), soit par les certificats d'énergie. Tout cela me semble très malsain.

Ne sachant trop comment financer l'équilibre, le Sénat a proposé de lancer des appels d'offres dont l'administration fera son affaire. Je crains que ces appels d'offres, parce que le modèle n'existe pas encore, ne nous fassent perdre quelques années qui, dans un domaine aussi technologique, suffiraient aux autres pays pour nous rattraper, voire nous dépasser. Il y a aussi la question de la prime. Pourquoi ne pas écouter les professionnels qui disent que la prime et le versement n'ont pas lieu d'être ? Même si le fournisseur perd des recettes avec l'effacement d'énergie, cet effacement, parce qu'il est significatif en nombre de mégawattheures et effectué en périodes de prix les plus élevés, a pour effet de faire baisser le prix du marché, ce qui se traduit par un gain pour le fournisseur.

Voilà pourquoi nous proposons que Réseau de transport d'électricité (RTE) conduise un test sur deux ans, en dressant le bilan exact des pertes et des gains de chaque fournisseur. Si, comme l'exemple américain tend à le montrer, la balance se révèle équilibrée ou positive, il n'y a pas lieu de verser quelque prime que ce soit – ce que d'ailleurs les autorités de Bruxelles ne manqueraient pas de qualifier de subvention déguisée ; en revanche, si le fournisseur subit une perte nette et avérée, l'effaceur lui rembourse le manque à gagner. Les effaceurs pensent que le marché peut décoller seul s'il repose sur des règles claires et saines comme celle-là. Si c'est le système des appels d'offres qui est choisi, ils seront réduits à les attendre, et la France perdra son avance technologique dans ce domaine. Avec le système transparent que nous proposons, l'effaceur ne sera rémunéré que sur le fondement des négawatts qu'il aura vendus ; le marché jouera et la facture du consommateur diminuera. Il s'agit donc d'une solution qui ne fait que des gagnants.

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