Intervention de Michèle Bonneton

Réunion du 15 avril 2015 à 16h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichèle Bonneton :

Je suis étonnée du calendrier annoncé : si l'Union européenne veut aller trop vite, elle se met de fait en position de demandeur par rapport aux États-Unis, ce qui n'est pas une position très favorable. Mis à part quelques secteurs, les droits de douane en direction des États-Unis sont déjà bas. L'harmonisation des normes est bénéfique au commerce. Cependant, l'éventuelle création d'un organe de coopération réglementaire sur les règles techniques pose questions, comme cela a déjà été dit par Madame Auroi : celle de l'association des États membres à cette structure, celle de la nature même des normes qui reflètent des choix politiques, c'est-à-dire des choix de vie d'une société.

Nous sommes interrogés dans nos circonscriptions. Les agriculteurs sont inquiets par rapport à leurs signes de qualité, dont bien peu ont été reconnus dans le CETA. Ils sont également inquiets par rapport à la concurrence d'une agriculture industrielle. Les PME, les acteurs de l'économie sociale et solidaire, les acteurs de la santé, de la protection sociale, et donc tous les citoyens se posent beaucoup de questions.

Par ailleurs, qu'en sera-t-il des services publics « à la française », d'autant plus qu'il y a des discussions au niveau du projet d'accord TiSA et que celui-ci interfère avec le TTIP ? Il est bien question en effet de livrer une part de nos services publics à la concurrence internationale.

Ce TTIP s'inscrit dans la continuité de l'ALENA (couvrant l'ensemble du continent Nord-américain). L'ALENA n'a pas tenu ses promesses pour le Mexique, tandis que son extension à l'Amérique latine a été abandonnée, notamment sous la pression de la société civile latino-américaine. Ceci n'est pas très engageant et nous interpelle. En quoi cette nouvelle étape d'harmonisation des modèles économiques voulue par le TTIP constitue-t-elle un réel gain pour l'Union européenne ?

Le TTIP cherche à ouvrir les marchés publics des deux côtés de l'Atlantique. Aux États-Unis, des clauses spécifiques existent, destinées à favoriser l'approvisionnement local et s'apparentant à de la discrimination positive pour certains fournisseurs. Le code des marchés publics l'interdit pour le moment en France pour ne pas fausser la libre concurrence. Toutefois, plusieurs initiatives dont une mission parlementaire et un groupe de travail à Bercy sont à l'oeuvre en France, afin de favoriser les circuits courts et leurs bénéfices pour l'environnement, la traçabilité et l'économie locale. Quelle est la position de la Commission sur ces initiatives ? Comment préserver le commerce local ?

L'Assemblée nationale a adopté, le 23 novembre 2014, une résolution européenne rejetant la perspective d'un mécanisme de règlement des différends dans l'accord entre l'Union européenne et le Canada. La Commission européenne a organisé une consultation publique sur le sujet l'été dernier, qui a recueilli 150 000 réponses. Ces réponses ont été très critiques : 97 % d'entre elles étaient négatives, y compris de la part d'entreprises et de personnalités politiques. Vous avez dit qu'il était envisagé une clarification juridique pour que les Gouvernements aient toujours le droit de légiférer dans l'intérêt général ; cela ne nous rassure pas : l'abaissement des choix politiques possibles des États est à craindre.

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