Intervention de général Denis Mercier

Réunion du 15 avril 2015 à 9h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

général Denis Mercier, chef d'état-major de l'armée de l'air :

Monsieur Le Bris, je serai heureux de vous recevoir à Norfolk avec M. Vitel pour votre travail sur l'évolution du rôle de l'OTAN.

Les drones MALE Reaper sont une capacité absolument essentielle. Aujourd'hui, nous ne pourrions pas nous en passer, ni en Irak ni en Afrique. En Irak, nous n'utilisons pas les nôtres, mais presque aucun tir n'est effectué sans une identification validée par un drone et sans une évaluation par le même moyen des dommages collatéraux, qu'il s'agit de minimiser. En Afrique, les drones nous permettent de mener de très nombreuses missions et ont contribué aux succès que nous avons obtenus récemment lors d'opérations spéciales. Le problème avec les drones, c'est que plus on en a, plus on en a besoin ! Ils garantissent une permanence de la surveillance, indispensable à nos opérations. Grâce aux drones, nous arrivons assez bien à suivre les groupes terroristes au nord du Mali et nous avons pu attaquer de nombreux petits dépôts de munitions et de carburant qu'ils avaient reconstitués.

Nous ne disposons pas encore d'un nombre suffisant de drones. Nous attendons la livraison du deuxième système, qui devrait intervenir en 2016. Initialement, il devait s'agir d'un système Block 5, mais cette version ne sera finalement prête qu'en 2017. Il s'agira donc d'un système Block 1, identique à celui que nous possédons actuellement. Ce n'est pas très grave : nous avons tellement besoin de drones qu'il vaut mieux disposer d'un second système Block 1 que nous ferons mettre à niveau ultérieurement – retrofit – plutôt que d'attendre le Block 5.

Nous avons qualifié la désignation laser sur nos avions directement sur un théâtre d'opérations avec la DGA – nous avons une bonne coopération avec elle en la matière. Récemment, nous avons effectué pour la première fois des tirs depuis des Mirage 2000 et des Rafale en utilisant l'éclairage laser fourni par le Reaper. Cela fonctionne très bien : la qualité de la désignation est remarquable. Cela nous ouvre de nouveaux domaines d'emploi.

La LPM prévoit la livraison de douze drones, en quatre fois. Nous avons absolument besoin de ces Reaper et nous saurons les utiliser. La question qui se pose désormais est celle de l'après 2025. À l'avenir, compte tenu de ce que ces systèmes nous apportent, il faut que nous en possédions en toute souveraineté, j'en suis persuadé. Il est donc très important que nous développions un drone MALE européen, avec les Allemands, conformément à ce qui est prévu, voire avec les Italiens. Cette démarche est soutenue par le ministre de la Défense. Sachons que, si nous fournissons les efforts nécessaires maintenant, le projet n'aboutira pas avant 2025.

S'agissant du drame d'Albacete, nos aviateurs ont unanimement été très sensibles à l'hommage national qui a été rendu aux victimes, ainsi que le soutien que leur ont exprimé les commissions parlementaires et le Président de la République. Ils y ont vu une vraie reconnaissance de leur engagement.

Neuf aviateurs français sont décédés dans l'accident, et cinq sont toujours blessés. Je tiens à signaler une belle avancée : la Maison des blessés que le ministre vient d'inaugurer à l'hôpital d'instruction des armées de Percy change la vie des familles.

Nous allons rassembler à nouveau les familles au mois de mai ou de juin.

J'ai confié au général Charaix la mission de reconstituer le scénario de l'accident et de rencontrer l'ensemble des personnes concernées. Certains aviateurs français et étrangers ont eu des comportements héroïques : un Américain a sauvé la vie de trois de mes hommes ; des mécaniciens et pilotes français sont allés aider aussi leurs camarades et préserver nos Rafale au mépris de leur vie, alors que tout était en flammes. Nous les avons identifiés. Mon objectif est désormais de les récompenser, pour leur montrer toute notre reconnaissance. C'est important.

S'agissant de l'impact financier, il existe un accord – standard agreement – au sein de l'OTAN : dans le cadre des exercices communs, chaque pays assume les risques qu'il prend et assure sa propre couverture. C'est une bonne règle. Dans le cas du drame d'Albacete, elle joue à notre détriment : quatre de nos avions ont été détruits – deux Mirage 2000 et deux Alpha Jet – et il n'y aura pas de remboursement. Mais elle jouera peut-être, demain, à notre avantage.

Monsieur de La Verpillière, la question des surcoûts liés aux OPEX est encore en discussion entre les états-majors et le ministère des Finances. Les décisions n'ont pas encore été prises : elles le sont généralement en fin d'année. Pour l'armée de l'air, nous estimons ces surcoûts à 250 millions d'euros sur l'année. Cette somme n'est pas énorme, mais il est très important que nos heures de vol supplémentaires et notre surintensité soient couvertes.

Je connais bien le cas de l'AIA d'Ambérieu-en-Bugey. Conscient des préoccupations locales, j'y ai envoyé récemment l'inspection de l'armée de l'air. Il s'agit d'un ancien atelier de l'armée de l'air que nous avons placé volontairement sous l'autorité du service industriel de l'aéronautique (SIAé). Or, de mon point de vue, il convient de clarifier la politique du SIAé à l'égard de l'AIA d'Ambérieu-en-Bugey.

L'organisation du SIAé a été réformée récemment. Il est désormais doté non plus d'un simple conseil de gestion, mais d'un conseil de surveillance, qui examine non seulement les questions relatives à la gestion, mais aussi celles qui se rapportent à la préparation de l'avenir. C'est une bonne chose. Ce conseil de surveillance est coprésidé par le délégué général pour l'armement et par le chef d'état-major des armées, qui m'a délégué cette fonction. J'ai inscrit la question de l'AIA d'Ambérieu-en-Bugey à l'ordre du jour de sa prochaine réunion, qui aura lieu avant l'été. À cette occasion, nous demanderons à l'ingénieur général Patrick Dufour, directeur central du SIAé, sa vision de l'avenir de l'AIA d'Ambérieu-en-Bugey, afin d'éviter les ouï-dire, les non-dits ou les incompréhensions. Il nous appartiendra, le cas échéant, de rétablir l'équilibre. Ce n'est pas le directeur central du SIAé qui imposera sa vision de l'avenir, mais le conseil de surveillance qui décidera en fonction de ses propositions. C'est ainsi que les choses se passeront.

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