Nous assumons le droit au doute et, s'il existait une solution incontestable, nous serions tous coupables de ne pas l'avoir déjà adoptée, compte tenu de la crise que connaît notre démocratie.
Je crois, cela étant, que notre réflexion ne doit pas faire l'impasse sur la responsabilité des organisations politiques en matière de représentation. Certes, la représentation idéale n'existe pas, mais on ne peut pour autant se réfugier sans cesse dans des stratégies de contournement, et il est important de compter ces organisations au nombre des lieux de pouvoir. Bernard Thibault évoque souvent le rôle des organisations syndicales dans le fonctionnement de la démocratie sociale ; il en va de même en matière de démocratie politique pour les organisations politiques, dont les pères de la Ve République ont tenu à inscrire le rôle dans la Constitution.
En matière de temporalité, la nécessité de prendre en compte, au-delà du quinquennat, un temps politique plus long est une idée vouée à s'imposer dans notre pays et ailleurs – nous l'évoquions hier avec nos amis marocains –, et la transition énergétique rend particulièrement cruciale cette articulation entre un temps court, qui est celui des décisions et des efforts, et un temps long dans lequel il convient de faire honneur aux générations suivantes. Ce qui nous ramène à la question de l'âge : comment dire en effet aux jeunes générations que nous allons prendre à leur place des décisions dont elles seront les premières à supporter les effets ?
Un professeur de Sciences Po nous disait à quel point son métier d'enseignant avait changé, expliquant que les paires d'yeux qui le regardaient autrefois faire son cours étaient désormais remplacées par une multitude de logos lumineux, sans qu'il sache si, derrière, les étudiants naviguaient sur les réseaux sociaux ou sur des pages leur permettant d'emblée de lui apporter la contradiction. Imaginons ce qu'il en est des changements qu'a connus le métier de législateur ! Cela emporte sur les évolutions de la démocratie des questions dont nous n'avons pas à avoir peur et dont c'est le devoir de cette commission de s'emparer puisque, aujourd'hui, quelque chose dysfonctionne dans le temps court.
Certains veulent croire qu'il faut respecter nos institutions, car elles ont su résister au temps. Mais elles n'ont plus rien à voir avec ce qu'avaient imaginé leurs créateurs : en 1958, il n'y avait ni la décentralisation, ni l'euro, ni l'Europe, ni le quinquennat. La Ve République n'est pas un bloc immuable ; elle a évolué, parfois sous la pression d'événements liés au temps court et en dehors de toute considération pour le temps long. C'est ainsi que le quinquennat et l'inversion du calendrier se voulaient une réponse de temps court à la cohabitation. Or j'ai le sentiment que le rôle du Parlement n'a jamais été aussi important que sous la cohabitation, laquelle a par ailleurs induit dans le fonctionnement des institutions un équilibre exemplaire entre la fonction du Président de la République et celle du Premier ministre, et je ne peux m'empêcher de souligner l'incohérence de ces décisions prises dans une perspective court-termiste, qui ont sur le long terme des effets paradoxaux sur l'évolution de notre démocratie et de nos institutions.
Le 28/12/2016 à 09:14, Laïc1 a dit :
"Ce qui nous ramène à la question de l'âge : comment dire en effet aux jeunes générations que nous allons prendre à leur place des décisions dont elles seront les premières à supporter les effets ?"
Cela est en effet tout à fait insupportable. On n'est plus au temps où la ploutocratie régnante et âgée envoyait les jeunes générations se faire tuer au front. Et pour cela, la généralisation du référendum est la seule solution, une fois de plus, pour échapper au lobby de l'argent, appuyé sur le lobby de l'âge.
Le 28/12/2016 à 09:08, Laïc1 a dit :
"Nous assumons le droit au doute et, s'il existait une solution incontestable, nous serions tous coupables de ne pas l'avoir déjà adoptée, compte tenu de la crise que connaît notre démocratie."
Puisque M. Bartolone est au courant que la solution à la crise est la généralisation du référendum, et la neutralisation des lobbies (l'un ne va pas sans l'autre), va-t-il dès lors plaider coupable en cas de prolongement de la crise ?
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