Intervention de Christian Eckert

Séance en hémicycle du 7 mai 2015 à 9h30
Dette souveraine des États de la zone euro — Présentation

Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget :

Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires européennes, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs, la proposition de résolution que vous examinez ce matin pose une question qui nous revient à intervalles réguliers, généralement au moment des lois de finances. Cette question, les membres de la commission des finances la connaissent bien, c’est celle de la dette publique et des moyens d’y faire face.

Ce texte est riche et vaste et, comme nous avons eu hier un débat sur le projet économique et social européen de la France, je concentrerai mon intervention sur la question, purement budgétaire, de notre dette publique.

À cette question centrale pour nos concitoyens, Nicolas Sansu et le groupe GDR apportent une réponse dont je reconnais qu’elle est construite et réfléchie mais que le Gouvernement ne partage pas, et je voudrais en expliquer les raisons.

Il existe une multitude de facteurs qui expliquent le niveau actuel de notre dette publique. Il y a la crise financière de 2008 et les décisions d’allégement des prélèvements prises pendant des décennies, comme le rapporteur vient de l’exposer, mais ce ne sont pas les seules causes.

Je pourrais ainsi évoquer les récessions précédentes, en particulier celle de 1993 qui a conduit la dette publique au-delà de 60 % du PIB, ou encore notre penchant à vouloir régler tous nos problèmes par de l’argent public. En effet, le niveau élevé de notre dette publique n’a pas été atteint du jour au lendemain : il résulte de l’accumulation des déficits pendant plus de trente ans. C’est un phénomène de long terme qu’il nous faut aujourd’hui enrayer, et le Gouvernement s’y emploie.

Une cause profonde et durable explique cette hausse continue. Elle est à rechercher dans notre manière de penser parce que dans notre pays, quels que soient les gouvernements et les majorités, dès qu’un problème se pose et que l’État doit agir, notre premier réflexe est de dépenser de l’argent public. Augmenter une dépense ou diminuer un prélèvement peut parfois être une solution, mais ce n’est pas une solution miracle. Au contraire même, croire que l’on peut résoudre tous nos problèmes avec de l’argent public revient à nous mentir collectivement, et en raisonnant ainsi, non seulement nous nous mentons, mais de surcroît nous n’apportons pas de solution. Bien souvent, les problèmes sont complexes et ne peuvent être résolus par des réponses simplistes. Il est donc vain de rejeter nos difficultés budgétaires sur l’Union européenne, sur les marchés financiers ou sur nos créanciers étrangers car elles résultent de nos décisions antérieures.

J’en viens aux solutions. Nous sommes habitués aux débats techniques des lois de finances, mais aujourd’hui, je voudrais exprimer plusieurs réflexions dans ce débat éminemment politique.

L’essentiel est de savoir quelle société nous voulons et sur quelles valeurs nous voulons la fonder. Une fois qu’on le sait, on connaît alors la réponse à la question de la dette. Ainsi, le Gouvernement et la majorité veulent une société plus juste, plus égalitaire, une société prospère dans laquelle chacun puisse trouver un travail et en vivre. Cela posé, les solutions sont claires : chacun doit contribuer à l’effort en fonction de ses moyens. C’est pourquoi nous avons demandé une contribution plus importante aux ménages les plus aisés, à travers, par exemple, le rétablissement de l’ISF et l’imposition des revenus du capital à hauteur de celle des revenus du travail. Et parce que nous voulons une société dans laquelle chacun puisse travailler et vivre des fruits de son travail, nous avons mené de front l’assainissement des comptes publics et une politique de soutien sans précédent à l’emploi. Car ce sont les travailleurs modestes, peu qualifiés, qui pâtissent les premiers du chômage, et lorsque nous dégageons des moyens pour l’emploi, lorsque nous mettons en oeuvre le pacte de responsabilité et de solidarité ou encore la nouvelle prime d’activité, ce sont les ouvriers, les employés, tous les travailleurs modestes que nous aidons.

Nous avons aujourd’hui un problème à régler : celui de notre endettement. Depuis 2012, nous avons fait plusieurs pas en avant : au niveau européen, il y a eu l’instauration du Mécanisme européen de stabilité et, demain, la taxe sur les transactions financières européennes permettra de réguler les échanges financiers spéculatifs ; au niveau national, nous avons obtenu des résultats puisque le déficit diminue régulièrement, passant de 7,1 % en 2011 à 4 % l’an dernier, et la dette sera stabilisée en 2016 avant de diminuer en 2017.

Le Gouvernement mène cette tâche d’assainissement de nos comptes avec constance et sérieux. Il a défini un rythme de réduction du déficit, et il s’y tient car il estime que c’est le bon, ni trop lent, ni trop rapide. Nous menons aussi cette tâche en étant fidèles à nos valeurs et à nos priorités : nous maîtrisons la dépense publique à un niveau historiquement bas mais, dans le même temps, nous prenons des mesures concrètes pour améliorer la vie des Français, particulièrement des plus modestes. Ainsi, depuis 2012, nous avons permis à ceux qui ont commencé à travailler tôt de partir en retraite plus tôt, augmenté les minima sociaux et les bourses étudiantes, revalorisé le minimum vieillesse et, dans la dernière loi de finances, allégé l’impôt des classes moyennes et des ménages modestes puisque avec la suppression de la première tranche du barème, neuf millions de ménages bénéficieront d’un allégement de 3,2 milliards d’euros. En 2016, nous renforcerons notre soutien aux travailleurs les plus modestes, aux ouvriers et aux employés, à ceux qui travaillent à temps partiel, avec les 2 milliards d’euros mobilisés pour la prime pour l’emploi afin d’améliorer leurs conditions de vie.

Le rapporteur évoque dans son rapport une « sidération de la dette ». Il n’y a pourtant aucune sidération, mais un constat lucide sur le niveau de la dette, un chemin clair d’assainissement des comptes et une mise en oeuvre progressive, au bon rythme parce qu’il faudra du temps pour apurer des déficits accumulés depuis trente ans.

Cette proposition de résolution soulève une bonne question, mais lui apporte une mauvaise réponse. C’est pourquoi le Gouvernement demande à l’Assemblée d’adopter les conclusions de la commission, ce qui conduira au rejet de la proposition de résolution.

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