Nous avons le plaisir et l'honneur de recevoir Ségolène Royal, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, pour une audition, ouverte à la presse, sur la préparation de la Conférence Climat 2015 (COP21).
Madame la ministre, c'est sous votre autorité et celle du ministre des affaires étrangères que travaille l'équipe interministérielle chargée de la négociation et de l'agenda des solutions. Le communiqué du conseil des ministres du 28 janvier précise qu'il vous appartient de définir la contribution de la France à la construction d'une position européenne ambitieuse et d'occuper le siège de la France dans les instances de discussion européennes et onusiennes. Par ailleurs, la mobilisation de la société civile s'appuie sur les initiatives que vous proposez.
La diplomatie parlementaire participe à l'effort de persuasion que la France entreprend pour que cette conférence soit un succès. À l'occasion de chacune de nos réunions avec nos homologues étrangers, nous rappelons combien il est important que nous parvenions à un accord en décembre. Cette conférence aura d'ailleurs un volet parlementaire, puisque des délégations internationales de l'Union interparlementaire (UIP) et de GLOBE International doivent se réunir les 5 et 6 décembre à l'Assemblée nationale et au Sénat. En amont de cette réunion, nous organisons par ailleurs deux événements à l'Assemblée afin de créer une dynamique euro-méditerranéenne dans le domaine du climat : le président Bartolone a accepté que se tiennent simultanément des réunions de travail des présidents de l'assemblée parlementaire de l'Union pour la Méditerranée, représentant quarante-deux pays, et un Forum euro-méditerranéen sur le climat rassemblant les ONG et d'autres représentants de la société civile, forum organisé par la Fondation Anna Lindh pour le dialogue des cultures, que j'ai l'honneur de présider.
L'année 2015 s'est ouverte sur des records de température. Les pays insulaires du Pacifique subissent déjà la montée des eaux et l'aggravation des ouragans et des cyclones ; ils l'ont rappelé au sommet Oceania 21, à Nouméa, qui s'est achevé vendredi.
Plusieurs éléments mobilisent notre vigilance. Tout d'abord, des retards sont constatés dans le dépôt des contributions nationales. Au début du mois d'avril, à la première date d'échéance, trente-trois pays avaient déposé leurs contributions : la Suisse et l'Union européenne avec ses vingt-huit membres, la Russie, les États-Unis, le Mexique, la Norvège et le Gabon, mais il n'y a dans cette liste aucun pays d'Asie, alors que c'est l'un des continents les plus menacés.
La qualité des contributions et le niveau des engagements sont par ailleurs jugés décevants par les acteurs de la société civile et les experts. Par exemple, l'année de référence choisie par les États-Unis pour la réduction de leurs émissions n'est pas 1990, mais 2005, plus avantageuse pour eux. De même, la Russie met en avant la capacité d'absorption de son immense massif forestier pour éviter d'avoir à changer son modèle énergétique, et la Suisse, qui prévoit une réduction de 50 % de ses émissions, le fait à raison de 20 % au titre des mécanismes de marché, c'est-à-dire des améliorations qu'elle promeut dans les autres pays et non sur son sol.
Dans ce contexte, la contribution européenne, qui reprend le deuxième paquet « Énergie climat » pour 2030, à raison d'une baisse de 40 % des émissions de CO2 par rapport à 1990, d'un rehaussement à 27 % de la part des renouvelables dans le bouquet énergétique et de 27 % de l'efficacité énergétique, avec la perspective d'une économie enfin décarbonée au milieu du siècle, est extrêmement importante, mais aura-t-elle un effet d'entraînement ?
L'adoption de la loi sur la transition énergétique montre que notre pays prend ses responsabilités. Quelle a été sa contribution à la position de l'Union européenne ? Sur quels leviers peut-on espérer agir encore pour rapprocher la position des pays tiers ?
En ce qui concerne le financement, dernier point de vigilance, comment passer des 10 milliards de dollars de capitalisation du Fonds vert à l'enveloppe de 100 milliards par an de fonds publics et privés en faveur des pays en développement, et de quelle manière articuler ces fonds avec l'agenda des solutions de la société civile ?