Je vous remercie de vos propos bienveillants et de vos questions auxquelles j'essaierai de répondre, bien que ma connaissance de l'entreprise soit encore imparfaite. Si vous m'accordez votre confiance, je pourrai approfondir certains sujets lors d'une prochaine audition.
Fort heureusement, la RATP dispose d'encore un peu de temps pour se préparer à l'ouverture à la concurrence, prévue pour 2024. Si la société Keolis est bien placée pour remporter certains marchés du Grand Paris, j'ai confiance dans les compétences techniques de la RATP en matière de métro automatique. La ligne 14, qu'elle a mise en service, fut l'une des premières de ce type. Je rappelle aussi qu'elle a automatisé la ligne 1 sans que le service ait jamais été perturbé. Le savoir-faire, qu'il importe de maintenir, est une des ressources fondamentales de l'entreprise.
Le développement à l'international ou en province est une manière de préparer l'ouverture à la concurrence. Le groupe apprend ainsi à répondre aux appels d'offres. Pour nous, compétitivité et productivité ne sont pas des mots-tabous, mais la RATP ne pourra évoluer qu'en dialoguant avec les agents et leurs représentants.
MM. Guillaume Chevrollier, Jean-Yves Caullet et Denis Baupin m'ont interrogée sur le Grand Paris, qui représente une chance tant pour notre région que pour tout le pays. Reste que la situation est pour le moins atypique : si l'hyper-centre bénéficie d'une des meilleures dessertes du monde, la qualité de la celle-ci chute rapidement aussitôt qu'on s'éloigne du périphérique.
Les projets prévus pour le Grand Paris dans le contrat de plan État-région, qui mobilisera 7,5 milliards d'euros pendant les prochaines années, permettra une évolution structurelle. La superficie de Londres équivaut à quinze fois, celle de Berlin à treize fois celle de Paris, ce qui explique la pression foncière que subissent les Parisiens. Bâtir une agglomération à bonne échelle sera une évolution positive tant pour Paris que pour l'ensemble du pays.
La desserte en métro automatique ne pouvant s'appliquer à tout le territoire, je n'entends pas négliger le bus, auquel Pierre Mongin a fixé des objectifs précis. L'autobus doit devenir un mode de transport propre. La RATP est suffisamment importante pour créer un effet d'entraînement sur la filière, mais, à l'heure actuelle, aucune offre française ne nous permettrait de disposer, à l'horizon de 2025, du parc à 80 % électrique et à 20 % à gaz rêvé par Pierre Mongin.
Disposer d'un parc moins bruyant et réellement propre, qui n'émette ni particules ni de gaz à effet de serre, est un défi à relever. On comprendrait mal que nous nous équipions de matériel chinois. (Murmures divers). Il faut par conséquent que les constructeurs français se mobilisent pour que la RATP puisse atteindre ses objectifs et disposer d'un modèle exportable, qui placerait notre région à la pointe du secteur.
L'autobus possède d'autres atouts : non seulement il permet d'assurer une desserte plus fine des territoires, mais sa mise en place est plus rapide que celle du métro ou du tramway. Cette souplesse permet éventuellement de préparer l'installation de modes de transport plus lourds. Il importe de choisir l'offre adaptée à chaque territoire, afin d'améliorer significativement la qualité de vie en Île-de-France, notamment dans les zones enclavées.
M. Bertrand Pancher a regretté que des fonctionnaires soient nommés à la tête d'entreprises publiques. Mon parcours s'est partagé entre l'entreprise et l'administration de l'État ou de collectivités, ce que je considère comme une force. Lorsqu'on revient dans une administration centrale après avoir occupé des fonctions sur le terrain, le regard qu'on porte sur la réalité s'est modifié. Je recommande avec beaucoup de modestie à ceux qui veulent exercer des responsabilités de passer de l'entreprise à l'administration, puisque celles-ci doivent dialoguer pour se comprendre.
M. Denis Baupin et Mme Laurence Abeille ont souligné l'importance d'informer les voyageurs, que le système SIEL renseigne déjà sur le temps d'attente. La RATP doit fournir une information multimodale et multiréseaux, en gare ou en station, et même embarquée. Elle y travaille au fur et à mesure qu'elle renouvelle les matériels. Elle prévoit aussi d'utiliser tous les supports digitaux, sans perdre de vue l'importance de limiter l'exposition aux ondes.
Une des ambitions pourrait être de proposer aux usagers des itinéraires multimodaux porte à porte, en prévoyant un guidage pour les personnes mal voyantes. Pour construire cette nouvelle étape, la RATP devra renforcer sa coopération avec la SNCF. Le travail est engagé sur le RER B, où un centre de commandement unique a été inauguré. La collaboration des opérateurs doit être transparente. Dans la ville intelligente, il faut traiter des données en masse pour proposer une information individuelle au voyageur.
M. Philippe Duron m'a interrogée sur les conséquences de l'organisation du Grand Paris sur la RATP. La Régie continuera à travailler avec l'autorité organisatrice, c'est-à-dire le Syndicat des transports d'Île-de-France, qui sera peut-être lui-même appelé à évoluer. Elle occupera une place de premier plan dans le développement du réseau.
Monsieur Jean-Yves Caullet, à l'époque où l'on envisageait peu de projets en Île-de-France, les projets internationaux ont permis à l'entreprise de maintenir ses compétences ; ils l'aident à présent à valoriser celles-ci et à enrichir son savoir-faire.
Dans son plan d'entreprise, le groupe s'est fixé un objectif ambitieux : augmenter de 30 % à l'horizon de 2020 le chiffre d'affaires de ses filiales. Il faut surtout à mes yeux que le développement se fasse de manière rentable pour la RATP, et que l'étanchéité comptable soit totale entre l'EPIC et ses filiales. (Approbations). L'autorité organisatrice ne comprendrait pas que l'argent des Franciliens finance des projets à l'international. Par ailleurs, comme l'a noté M. Guillaume Chevrollier, consacrer des moyens à l'amélioration des réseaux existants doit rester une priorité.
La fraude crée un manque à gagner de plusieurs dizaines de millions d'euros sur le seul réseau de la RATP. Son importance doit toutefois être relativisée : sur le total des voyageurs, on compte 5 % de fraudeurs dans le métro et 10 % dans le bus. Le phénomène ne me paraît pas justifiable, compte tenu de l'existence d'une offre tarifaire sociale et ciblée. La RATP emploie plus de 1 000 personnes à lutter contre ce phénomène. Elle doit faire plus, ce qui suppose de comprendre la diversité des réseaux et le profil des fraudeurs.
Sur la qualité de l'air dans le métro, l'ANSES publiera cet été une étude, qui comprendra un état des lieux et des recommandations. Il faudra probablement réduire l'émission de polluants, en travaillant sur le freinage, et améliorer le renouvellement de l'air, dimensionné davantage en vue de la sécurité incendie plutôt que dans un souci de qualité de l'air.
Monsieur Laurent Furst, j'ai rappelé que la RATP avait amélioré sa productivité, en révisant l'organisation de ses ateliers et ses achats. On ne répondra aux attentes des collectivités qu'en poursuivant une mobilisation qui a déjà permis de rendre chaque année environ 100 millions d'euros au STIF sur le contrat en cours.