Intervention de Dominique Raimbourg

Réunion du 13 mai 2015 à 10h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Raimbourg, rapporteur :

Dans ce projet de loi visant à transposer en droit interne des directives et décisions-cadres européennes, nous avons succombé à la tentation de procéder à un certain nombre d'ajouts, compte tenu de la rareté des textes de procédure pénale pouvant servir de véhicule législatif à certaines modifications.

L'aspect de transposition est simple d'un point de vue général mais assez compliqué dans le détail du texte, qui est long et d'une lecture assez difficile. Trois décisions-cadres ou directives sont notamment concernées : celle du 27 novembre 2008 sur la probation, celle du 23 octobre 2009 sur le contrôle judiciaire, celle du 30 novembre 2009 sur les conflits de compétences. Le but de l'opération est important : il s'agit d'éviter les doublons de poursuites au niveau européen, en favorisant l'échange d'informations entre les autorités poursuivantes des différents États – toutes ne portent pas le nom de procureur.

Une première disposition vise à faire en sorte qu'un contrôle judiciaire prononcé dans un État à l'encontre d'un ressortissant étranger européen puisse être exécuté dans l'État de résidence de ce dernier. Ainsi, si la France poursuit un individu de nationalité allemande, le contrôle judiciaire le concernant pourra être exercé par l'Allemagne dès lors qu'il s'y réinstallera en attendant son procès en France. Le même mécanisme est prévu en matière de probation : dès l'instant qu'un ressortissant européen sera condamné à une telle mesure dans un État – travailler, rembourser la victime, se faire soigner –, elle pourra être exécutée dans un autre État de l'Union européenne. Ces dispositions reposent sur des principes simples, mais elles sont difficiles à formuler puisque devant s'adapter aux législations des vingt-huit pays de l'Union européenne.

Deux autres dispositions relevant de la protection européenne des victimes figurent dans le texte : l'une permet aux victimes de bénéficier de mesures de protection vis-à-vis de l'auteur de l'infraction ; l'autre établit des normes minimales en matière de respect des droits des victimes dans les procédures pénales.

Ce texte, symboliquement très important, traduit l'effort de l'Europe pour tenter d'harmoniser le droit pénal à la fois en matière de droit des victimes et de peines autres que la détention. Il est difficile de mesurer dès à présent les implications de ce dispositif, mais elles devraient rester limitées si l'on se réfère au nombre de mandats d'arrêt européens prononcés et reçus par la France, de l'ordre de 1 000 à 1 200 dans chaque sens.

Diverses propositions d'adaptation composent le second volet du texte. La première émane de Mmes Nieson et Carrillon-Couvreur, à travers un amendement tendant à réintroduire la sur-amende de 10 % au profit des associations d'aide aux victimes. Adoptée dans la loi du 15 août 2014, cette mesure a été annulée par le Conseil constitutionnel au motif qu'elle violait le principe d'individualisation des peines, puisque le juge ne pouvait moduler la sur-amende. L'amendement en question prévoit donc cette possibilité de modulation. Il propose également de mettre cette mesure à la disposition des autorités administratives indépendantes (AAI) qui sanctionnent les infractions économiques.

D'autres adaptations sont liées à des censures prononcées par le Conseil constitutionnel. Celui-ci ayant, par exemple, considéré que la garde à vue de quatre-vingt-seize heures ne pouvait pas s'appliquer pour les infractions économiques pures, il a fallu permettre des modes d'enquête adaptés pour les cas d'infraction liés à la criminalité organisée d'ordre économique.

Enfin, une série d'amendements tient compte des observations de la Cour de cassation en harmonisant et précisant certains délais de procédure. D'autres tendent à favoriser, quand elles sont possibles, les alternatives à l'emprisonnement afin de remédier à la surpopulation carcérale.

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