Je rejoins mes collègues sur la notion d'insécurité juridique. On aura beau prendre toutes les décisions que l'on voudra, rien ne sera opérant si le contexte n'est pas favorable au développement des langues régionales. La question est donc à la fois politique et juridique. Nous devons nous battre sur les deux fronts : le problème juridique sera d'autant plus facile à régler que nous serons forts sur le plan politique. L'engagement du Président de la République constitue à cet égard une avancée sur laquelle nous devons nous appuyer.
Prenons acte que le français est devenu une langue régionale à l'échelle de l'Europe. Nous continuons à promouvoir la francophonie, et c'est heureux. Mais pourquoi ne pas promouvoir les autres langues régionales, qui ont toutes leur valeur ? Je crains que nous n'en restions sur ce sujet aux vieilles lunes de la République centralisatrice. Il faudra bien s'attaquer un jour à ces fondements-là.
Nous avons rencontré cette semaine des députés britanniques préoccupés par le rayonnement de leur langue. Il est naturel que chacun soit attaché à sa langue. Il n'y a donc aucune raison que les locuteurs des langues régionales ne défendent pas les mêmes revendications et les mêmes droits que les locuteurs des langues nationales à l'échelle de l'Europe.
C'est par ailleurs un enjeu de développement économique. Nous regrettons souvent que nos concitoyens mettent si peu d'enthousiasme à apprendre d'autres langues. Le multilinguisme est une richesse que nous n'exploitons pas suffisamment. Cela supposerait, il est vrai, de surmonter des blocages institutionnels, sociaux et politiques. Ce n'est donc pas seulement un problème de langue ; c'est aussi un problème de société. L'approche de cette question doit évoluer : le temps où elle menaçait l'unicité de notre pays est révolu.