Intervention de Georges Sabra

Réunion du 10 octobre 2012 à 9h45
Commission des affaires étrangères

Georges Sabra, membre du bureau exécutif du Conseil national syrien :

Le Moyen-Orient est au centre des préoccupations, du fait de sa richesse en pétrole, de la présence d'Israël, de la mer Méditerranée… nous sommes conscients des intérêts qui sont en jeu dans la région. Mais pendant trop longtemps, ces intérêts ont trop longtemps justifié le soutien à des régimes autoritaires, comme en Libye ou en Egypte. Bien sûr, il est plus facile de ne parler qu'avec un seul interlocuteur qui décide de tout, mais c'est contraire aux intérêts des peuples. La démocratie rend les échanges plus difficiles mais plus beaux. Nous voulons que les peuples participent, pas que les dictateurs dictent leurs intérêts. L'absence de démocratie est un problème pour nous, c'est ce qui pousse tant de nos jeunes à risquer leur vie pour venir chez vous, mais cela pose aussi des problèmes pour vous.

Dans la structure actuelle du gouvernement transitoire, les femmes représentent 5%. Dans la nouvelle structure, qui sera adoptée à Doha la semaine prochaine, elles seront 15%. Nous ne pouvons pas nous satisfaire de ce chiffre qui est encore modeste, mais c'est tout de même un progrès et nous en sommes fiers. Mon ambition, c'est le modèle suédois, moitié d'hommes et moitié de femmes.

Comment voyons-nous la paix dans la région ? Les dictatures n'ont pas fait la paix et n'ont pas pu récupérer les territoires occupés dans le Golan. Il faut laisser une chance à la démocratie. La démocratie peut récupérer les territoires occupés, respecter les résolutions de l'ONU et bâtir une paix sur la justice et les droits de tous.

Notre relation avec la Turquie est imposée par la géographie et la révolution. Cette longue frontière commune a fait que les premiers réfugiés sont partis dans ce pays pour fuir la violence du régime.

Nous avons une grande considération pour les efforts des Turcs. Car ce pays a accueilli des réfugiés et nous laisse travailler depuis son territoire. Mais sans aucun doute tous les groupes de l'opposition syrienne tiennent à l'indépendance de décision de la Syrie.

S'agissant des kurdes, nous sommes conscients du problème. Nos concitoyens kurdes ont été persécutés deux fois : parce qu'ils étaient syriens et kurdes.

Au sein du CNS, nous voulons une citoyenneté à égalité pour tous les citoyens quelque soit leur appartenance ethnique ou religieuse, dans le cadre de l'unité de la Syrie et de son intégrité territoriale. Nous voulons que les kurdes puissent parler et chanter dans leur langue, qu'ils l'apprennent comme cela est le cas pour les Arabes.

Le printemps arabe est-il un automne ? Je respecte cette opinion mais je ne la partage pas. Elle est même injuste. Vous, les Français, êtes professeurs ès révolutions. Mais vous savez que la vôtre a duré des décennies avant qu'elle ne triomphe. Idem en Russie. Laissez-nous du temps. Les Egyptiens et les Tunisiens ont élu leur président en toute liberté. Ils ont rédigé une constitution, nous allons nous aussi le faire.

Nous travaillons dans le ce sens du droit des femmes. Pendant 50 ans, la Syrie n'a eu ni politique ni vie politique. Le premier recul lié à cette période a été la position de la femme. Les femmes ont été les premières victimes. Nous voulons réhabiliter la politique pour que les citoyens – en particulier les femmes – retrouvent leur place.

Le régime pourrait-il être acculé jusqu'à utiliser des armes chimiques ? Nous ne le savons pas mais le risque est élevé. Saddam Hussein, en son temps, l'a fait contre les kurdes. Or, le régime d'Assad est du même ordre. Aujourd'hui, 15% des constructions, en Syrie, sont détruites. Avec une moyenne de 4 à 5 personnes par maison, vous avez plus de 10 millions de Syriens qui, aujourd'hui, n'ont plus de toit !

Et puis le régime cherche indéniablement à déstabiliser la région. Il veut transformer une révolution contre la dictature en un conflit régional suscitant des interventions extérieures. La communauté internationale a assurément une responsabilité pour empêcher cela. La Syrie d'aujourd'hui fait d'ailleurs penser au régime hitlérien. Hitler a détruit l'Europe. Bachar veut faire pareil avec son pays et la région. Les villes syriennes ressemblent aujourd'hui aux villes allemandes au sortir de la seconde guerre mondiale. Nous devons travailler tous ensemble pour empêcher la contagion.

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