Monsieur le président, madame le ministre, chers collègues, on dit qu’avant de faire un chef-d’oeuvre, il faut faire un brouillon. Jamais expression ne sera mieux identifiée au processus qui nous aura conduits ici, à ce texte qui se veut ambitieux et large mais que nous qualifierions de bric-à-brac. Les médias ne s’y sont pas trompés, puisque ce qui devait être la « grande loi du quinquennat » a été superbement boudé par les chroniqueurs et les émissions de grande écoute. Lorsqu’on parle plus des incidents de séance sur les voyelles de Mme le président que du fond, c’est peut-être, madame le ministre, chers collègues, qu’il y a un problème de conception.
Lors de l’examen du texte en première lecture, je vous avais longuement expliqué pourquoi votre loi, qui veut réduire les émissions de CO2, va les augmenter en accroissant la part des énergies intermittentes. Je n’y reviendrai pas ici. Le sujet n’est d’ailleurs pas épuisé, car sur le volet de la demande énergétique, je pourrais vous citer un article d’un professeur du Dartmouth Collège, Erin Mansur, sorti en 2012 aux États-Unis et qui avait fait grand bruit. En effet, il avait pointé une contradiction : les véhicules électriques ont une empreinte carbone élevée car ils se rechargent de nuit…lorsqu’on produit de l’électricité avec du charbon. Il va en effet sans dire que les milliers de panneaux photovoltaïques que vous nous promettez dans cette loi ne seront strictement d’aucune aide, en l’état des connaissances, pour recharger les millions de voitures électriques que vous appelez de vos voeux – mais je suis sûr que mes collègues, en discussion générale, reviendront sur cet énorme paradoxe.
Je voudrais aller directement au but et vous expliquer pourquoi ce texte mérite la motion de rejet préalable. Je ne ferai pas de ce moment, comme on a hélas parfois tendance à le faire, un apéritif de la discussion générale. Je vous rappelle, chers collègues, que la motion de rejet préalable a pour « objet de faire reconnaître que le texte proposé est contraire à une ou plusieurs dispositions constitutionnelles ou de faire décider qu’il n’y a pas lieu à délibérer ».
Je défendrai cinq arguments principaux en la matière, et ferai appel, pour être certain de vous convaincre, à Abraham Lincoln, Ronald Reagan, Confucius, Aristote et Christophe Colomb.