Si donc vous devenez des sociaux-démocrates allemands, nous, les Européens convaincus, nous ne nous en plaindrons pas. En réalité, si on regarde bien comment les choses se sont passées, au-delà du langage diplomatique de la France et de l'Allemagne qui a cours après ce genre de sommet, vous avez été instrumentalisés par l'Espagne et l'Italie, qui avaient besoin de recapitaliser leurs banques.
Il y avait un pacte de croissance, plus politique que réel et qui n'était que le paquet de ce qui avait été antérieurement décidé. Alors, dans la nuit, comme cela se produit quelquefois, les deux pays ont pris la France en otage en disant : « pas de pacte de croissance sans un mécanisme européen de stabilité pour aider nos banques », et voilà pourquoi l'Allemagne a cédé. Elle a même cédé pour deux raisons. La première, c'est que l'Espagne et l'Italie, contrairement à la France, sont les bons élèves de l'Europe. Ils sont en difficulté mais ils ont mis en place des mesures, des réformes structurelles qui leur permettent de regarder l'avenir avec confiance, ce que vous hésitez, par manque de courage politique, à faire dans notre pays. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Et puis, l'Allemagne, c'est l'Allemagne : il fallait à Madame Merkel un large consensus au Bundestag ; avec ce petit pacte de croissance venant s'ajouter gentiment au traité antérieur, on arrivait à imposer la solidarité avec la discipline et avec le petit volet « croissance » qu'on avait accordé, pour ne pas les humilier, aux Français qui avaient fait tant de reniements.
Le vrai problème, c'est que vous n'avez pas compris ce qu'est la croissance ; vous croyez que la croissance, cela se décrète ; qu'on prend un arrêté, un matin, et qu'on dit « demain, la croissance sera de 2 % »... D'ailleurs, l'Allemagne révise aujourd'hui ses taux de croissance à la hausse, et la France révise les siens à la baisse. Ainsi, s'il y avait un modèle à choisir entre la Grèce et l'Allemagne, peut-être la France devrait-elle s'inspirer plutôt de l'Allemagne que de la Grèce, de l'Italie ou de l'Espagne, dont les peuples se retrouvent dans les situations difficiles que nous connaissons.
Vous avez un nouvel allié, c'est M. Monti. J'ai regardé ce que propose M. Monti dans son pays : plus de garantie de l'emploi à vie pour les fonctionnaires, qu'on peut licencier ; assouplissement des règles de licenciement pour l'ensemble des salariés ; dérégulation totale du temps de travail ; augmentation de la durée de cotisation pour la retraite… C'est un exemple qui me paraît plus libéral que solidaire, dans une Europe qui, justement, aurait besoin de se construire sur un équilibre entre discipline et e solidarité.