Intervention de Sandrine Doucet

Séance en hémicycle du 20 mai 2015 à 15h00
Transformation de l'université des antilles et de la guyane en université des antilles — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSandrine Doucet :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, chers collègues, le travail législatif de ces dernières semaines nous a permis de saisir l’acuité des enjeux du projet de loi portant transformation de l’université des Antilles. Il s’agit de mettre fin à une succession de crises et de permettre, par des statuts qui s’inscrivent dans le cadre de la loi sur l’enseignement supérieur et la recherche du 22 juillet 2013 mais qui tiennent également compte des enjeux et des particularités locales signalés par différents acteurs, d’organiser la gouvernance de la nouvelle université.

C’est pourquoi le Sénat et l’Assemblée nationale se sont attachés à en conforter l’unité et à rapprocher autant que possible son fonctionnement du droit commun des universités, tout en préservant l’indispensable autonomie des pôles instaurée par l’ordonnance du 17 juillet 2014.

Toutefois, les deux assemblées ont échoué à s’entendre sur une innovation introduite par le Sénat tendant à lier l’élection du président de l’université et des vice-présidents de pôle universitaire régional sous la forme d’un « ticket » de candidats préalablement constitué et soumis au seul vote du conseil d’administration.

Aujourd’hui, notre débat et notre vote ont pour objet de conclure cette recherche d’équilibre que l’on peut présenter en quatre points. Il convient tout d’abord de tenir compte de l’échec des aménagements de l’ordonnance de 2008 concernant le pôle guyanais, puisqu’ils n’ont pas empêché les grèves de l’automne 2013 et le retrait du pôle guyanais de l’ensemble universitaire des Antilles. Il faut ensuite renforcer l’autonomie des deux pôles universitaires régionaux de la Martinique et de la Guadeloupe, dans le cadre de la loi ESR, en les assimilant aux regroupements des composantes. Cette autonomie doit néanmoins s’exercer dans le respect de l’unité de l’université, avec des organes centraux qui conservent les prérogatives que prévoit le code de l’éducation. Enfin, il faut prévoir des éléments relatifs à l’existence de pôles dont l’unité est renforcée, en encourageant la souplesse et le dialogue pour ce qui concerne la répartition des moyens et le non-renouvellement du mandat des présidents de pôle.

C’est dans cette logique que l’assemblée a rejeté le « ticket » de nomination des présidents qui suscitait des tensions. Il ne s’agit pas de revenir sur l’équilibre atteint à l’Assemblée en première lecture ; il faut adopter ce texte en nouvelle lecture tel qu’il a été voté le 19 février dernier.

Cependant, afin de nous saisir de tous les enjeux liés à la nécessité d’un pôle consolidé, je souhaiterais revenir sur plusieurs éléments de contexte. Ne nous trompons pas de débat : il s’agit bien ici de légiférer en faveur des objectifs de cette majorité et de ceux qu’a fixés le Président et qu’a réitérés Mme la ministre ces derniers jours : la jeunesse, l’éducation, l’égalité et l’équité.

Les Antilles doivent en effet relever un double défi : répondre aux attentes de la jeunesse, dont les taux de diplômes sont bien inférieurs à ceux de la métropole, et confirmer ces entités territoriales dans leur rôle de façade scientifique dans le monde américain. Comme l’a indiqué M. le rapporteur, les diplômés de l’enseignement supérieur, qui représentent 42 % des métropolitains de 25 à 34 ans, n’en représentent que 27 % en Martinique et 22 % en Guadeloupe. Ces performances décevantes sont notamment liées à des taux d’échec très élevés en licence, de l’ordre de 68 % en première année. La moitié de ces étudiants bénéficient de bourses octroyées sur critères sociaux.

Cependant, les Antilles possèdent aussi des éléments de rayonnement scientifique comme l’Institut Pasteur de Guadeloupe, le pôle de recherche agro-environnementale de la Martinique ou encore l’INSERM et le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement, le CIRAD.

Le Président de la République nous a rappelé aux Antilles, voici quelques jours, ce message d’unité et d’équité en faveur de la jeunesse. « Vous avez voulu l’université des Antilles, mais la compétition n’a pas lieu d’être. Vous avez le devoir de faire vivre dans l’unité l’Université des Antilles », a-t-il déclaré tout en précisant que 750 000 euros seront apportés à cette université. La politique de proximité, si nécessaire aux jeunes antillais, est confortée par la création de deux IUT et d’une nouvelle école régionale de la deuxième chance.

L’ensemble de ces mesures et d’autres encore, comme la recherche sur le cancer, pour laquelle un pôle existera dans chacune des deux îles, illustrent la volonté d’équité qui anime les décisions politiques. C’est pourquoi nous devons être conscients des enjeux et accomplir à notre tour notre devoir d’unité en adoptant ce projet de loi.

Soyons prudents, toutefois : loin de nous le dessein de nous exonérer de la moindre attention sur l’avenir de l’université des Antilles. Nous appelons tous les acteurs qui se sont impliqués dans ce débat à considérer ce projet non pas comme une fin, mais comme le début d’un travail d’unité et de concorde. Les Antilles en ont besoin pour leur reconnaissance dans le paysage scientifique américano-caribéen. Pour leur jeunesse, c’est une urgence.

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