Intervention de Jean-Philippe Nilor

Séance en hémicycle du 20 mai 2015 à 15h00
Transformation de l'université des antilles et de la guyane en université des antilles — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Philippe Nilor :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, chers collègues, « la vraie politique ne peut […] faire un pas sans avoir auparavant rendu hommage à la morale […]. Toute politique doit s’incliner devant le droit, et c’est ainsi seulement qu’elle peut espérer arriver, quoique lentement, à un degré où elle brille d’un éclat durable. » Cette affirmation de Kant doit nous animer en ce moment décisif de la transformation de l’université des Antilles et de la Guyane en université des Antilles. C’est en effet un édifice naissant encore vulnérable, qui est déjà gangrené par des coups bas, des querelles, des déchirements, des protections politiciennes en bande organisée et même des menaces – je dis bien : des menaces – sur l’intégrité physique et morale de ses dirigeants. Au terme de multiples épisodes, pour certains très épineux, l’université des Antilles que nous sommes en train de créer est déjà menacée d’une future scission.

Je rappelle que nous pouvions éviter qu’en novembre 2013, la secrétaire d’État de l’époque permette au pôle guyanais de se transformer en université de plein exercice, à contre-courant complet de sa politique de regroupement des universités affichée par ailleurs, et qu’elle entérine la création d’une université de 2 000 étudiants, bien en dessous du seuil critique de viabilité estimé à 10 000 étudiants. Nous pouvions tout autant éviter encore les incessantes dissensions entre élus de Martinique et de Guadeloupe, qui ont empêché l’émergence d’une position commune. Et je ne parlerai pas de ces amendements honteux ayant suscité des débats sur la répartition des dotations budgétaires entre les deux pôles, qui ont donné lieu à l’expression de lamentables divergences.

Tout ce temps perdu ne contribue pas à porter cette jeune université sur des fonts baptismaux lui garantissant pérennité et explique sans doute que seul un étudiant antillais sur quatre désire y suivre un cursus universitaire. Cette fuite de nos cerveaux diplômés entrave toute possibilité, tout espoir de développement.

Aujourd’hui, il nous faut réagir. Il y a en effet urgence et la situation est grave. Nous avons l’obligation, le devoir de répondre à l’attente des étudiants et des enseignants, qui veulent qu’émerge une université construite sur des bases solides et durables et que soient prévenues de stériles rivalités, d’où qu’elles viennent, et qui déjà n’émaillent que trop sa genèse.

Saurons-nous être à la hauteur ? Je crois que, pour cela, il faut dès maintenant s’attaquer clairement aux dérives financières et judiciaires que connaît aujourd’hui l’université. Je pense bien sûr aux graves abus commis par le laboratoire du Centre d’étude et de recherche en économie, gestion, modélisation et informatique appliquée – le CEREGMIA –, dénoncés par plusieurs rapports successifs de la Cour des comptes, de l’Inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et du Sénat. Neuf millions d’euros – je dis bien : neuf millions d’euros – se sont volatilisés. Cette affaire doit trouver une conclusion judiciaire, car il ne saurait y avoir de futur sain pour la nouvelle université sans un apurement du passé, du passif et une moralisation des pratiques.

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