Intervention de Serge Letchimy

Séance en hémicycle du 20 mai 2015 à 15h00
Transformation de l'université des antilles et de la guyane en université des antilles — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSerge Letchimy :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, soyez rassurés : je ne serai juge de qui que ce soit, et je ne ferai pas de la situation de l’université mon fonds de commerce politique. Cela étant dit, il y a urgence : depuis deux ans, nous connaissons une situation très difficile ; 11 000 jeunes attendent, ainsi que des dizaines d’enseignants, des agents et des élus des deux pays – la Martinique et la Guadeloupe.

Le vote, aujourd’hui, de ce texte, mettra fin à une situation rocambolesque. De fait, à l’heure actuelle, on ne peut pas réunir le conseil d’administration, le budget a été arrêté par le recteur de la Guadeloupe et les étudiants nourrissent des inquiétudes grandissantes, ne sachant pas si leur diplôme sera validé ni comment ils pourront s’inscrire l’année prochaine. Un grand nombre d’entre eux, d’ailleurs, partent.

Beaucoup plus grave, le cumul des incertitudes a conduit à la prolifération de mesures dépourvues du moindre sens et qui excluent des priorités les jeunes de la Martinique et de la Guadeloupe. Je rappelle que deux jeunes sur trois quittant la Martinique pour faire des études à l’extérieur ne reviennent pas au pays. Autrement dit, la Martinique perd environ mille personnes par an : nous sommes déjà passés de 400 000 à 390 000 personnes.

Cela veut dire, madame la ministre, que la situation est urgente et, pour ce qui me concerne, je voterai ce texte.

Bien entendu, il y a un débat sur la pertinence de l’unité. Je rappelle à mes collègues qui ont évoqué dans leurs interventions – ce que je comprends parfaitement – le ticket à trois et le ticket séparé, que nous avons assisté, en 2013, au départ de la Guyane, parce que les revendications qu’elle avait exprimées en faveur de son autonomie et du fonctionnement autonome de ses institutions, n’avaient pas été suffisamment prises en compte. Je rappelle aussi que nos aînés – parmi lesquels des noms très célèbres : ont été évoqués tout à l’heure les cinq présidents issus de la Martinique et les cinq autres issus de la Guadeloupe – ont réussi, pendant de très nombreuses années, autant que faire se peut, à avancer.

De mon point de vue, on n’a pas été suffisamment attentif à l’expression des différences, à l’organisation des politiques liées aux territoires. Qui peut me démontrer que la situation de la Guyane est exactement celle de la Martinique ? La Martinique est une île tandis que la Guyane appartient au continent. Qui peut me démontrer que la Martinique doit avoir la même stratégie que la Guadeloupe sur le plan universitaire ou en matière de recherche-développement ? Pour quelles raisons la Guadeloupe ne définirait-elle pas des stratégies de développement liées à son université, et ne pourrait-elle pas administrer son pôle de manière légèrement différenciée ? Qui va-t-on convaincre que le seul mode d’organisation serait l’autocratisme, l’autoritarisme unitaire d’une seule personne ? Certains se revendiquent de cette école ; ce n’est pas mon cas. Je considère que l’on peut parfaitement travailler ensemble dans le respect de nos différences et dans le cadre d’une organisation autonome.

J’ai combattu, il est vrai, l’amendement portant sur la répartition du budget, que Victorin Lurel avait présenté, en se prévalant légitimement des investissements extrêmement importants qu’il a engagés en Guadeloupe. De fait, la collectivité de Guadeloupe s’est, en certaines occasions, quelque peu substituée à l’État, d’où une différence importante en termes d’investissements réalisés. Victorin Lurel l’a revendiqué. Mais nous lui avons indiqué, dans le cadre de l’accord que nous avons conclu en juillet 2014, qu’il faut penser, non seulement au passé mais aussi à l’avenir. Cet amendement n’est d’ailleurs plus d’actualité.

Je considère que c’est le dialogue qui permettra d’assurer l’organisation de l’université dans le respect de l’autonomie. Cela a déjà commencé à se voir, dans le cadre de ce que l’on appelle le « dialogue budgétaire », au moyen d’une répartition extrêmement claire. À présent, nous avons l’obligation de mettre en place l’université très rapidement.

J’ai souvent entendu parler du CEREGMIA. Une procédure judiciaire est engagée : laissons la justice suivre son cours. Si des agissements peu catholiques ont eu lieu, ils seront sanctionnés. Une procédure disciplinaire est même en cours. J’ai regardé très précisément les conventions signées entre l’université et le CEREGMIA : douze l’ont été avant 2010. On n’a pas de leçons à donner aux gens. On est en train d’enfumer le débat au détriment des jeunes étudiants de la Martinique et de la Guadeloupe. C’est pitoyable.

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