Mon curriculum vitae vous ayant été communiqué, je me contenterai de retracer à grands traits mon parcours de plus de quarante ans dans l'assurance, en distinguant quatre périodes.
La première a été celle de Groupama Assurances, groupe au sein duquel ma carrière a duré vingt-neuf ans. Au cours des dix premières années, j'ai eu la chance d'occuper des fonctions variées dans les différents départements de la Samda, qui était à l'époque la plus importante des filiales de Groupama. Cette expérience très formatrice m'a permis de découvrir quelques-unes des multiples facettes de l'assurance et d'acquérir les bases de ce qui est devenu mon métier – assureur. J'ai ensuite accédé à des responsabilités de direction, à la Samda d'abord, au siège du groupe ensuite, avant de me voir confier en 1990 la direction générale d'une caisse régionale, en 1993 celle de Groupama Assurances France, et en 1995 enfin la direction générale du groupe.
Au cours de ces trois décennies, Groupama s'est profondément transformé et a changé de taille ; j'ai bien sûr contribué à ces transformations. Je citerai trois événements qui ont marqué l'histoire de ce groupe et auxquels j'ai pris une part active : à la fin des années 1980, la mutualisation de la Samda et sa fusion avec les Assurances mutuelles agricoles, pour donner naissance à Groupama ; au début des années 1990, la fusion des caisses régionales, dont le nombre est passé en quatre ans de soixante-sept à une vingtaine ; en 1998 enfin, la privatisation du GAN et son acquisition par Groupama.
La deuxième période de ma carrière s'est déroulée à CNP Assurances, groupe public et premier assureur-vie français, que j'ai rejoint en l'an 2000. Au sein du directoire, j'ai été chargé de développer le réseau international du groupe, expérience passionnante. Pendant un peu plus de trois ans, j'ai structuré le dispositif permettant à CNP de promouvoir auprès de grandes banques étrangères et de réseaux postaux le modèle original de bancassurance développé en France avec le succès que l'on sait en vendant ses produits dans les réseaux de La Poste et des caisses d'épargne. Pour ne donner qu'un exemple de mes réalisations au cours de cette période, je citerai l'acquisition et la restructuration de Caixa Seguros au Brésil. Cette filiale de la CNP a depuis lors connu un développement remarquable et elle contribue aujourd'hui de façon très significative aux résultats du groupe.
La troisième période de ma carrière s'est déroulée au Crédit Agricole Assurances. En 2004, je rejoins Crédit Agricole SA, la holding de tête du groupe. La mission qui m'est confiée est, comme à la CNP, de créer ex nihilo un réseau international « Assurances ». Je constitue les équipes au siège afin d'accompagner un développement très rapide qui se fait par acquisition ou création de sociétés d'assurance. Cette aventure professionnelle très stimulante me permet de découvrir de l'intérieur l'efficacité du modèle de bancassurance du Crédit Agricole et le monde de la banque, si différent de celui de l'assurance. Lorsque je prends ma retraite, le 1er janvier 2010, Crédit Agricole Assurances est présent dans une quinzaine de pays et l'activité internationale représente plus de 20 % du chiffre d'affaires du groupe.
Retraité, je décide enfin de me lancer dans le conseil stratégique indépendant, une activité que je développe depuis cinq ans. J'ai une dizaine de clients ; ce sont pour l'essentiel des sociétés d'assurance étrangères ou des assureurs français que je conseille pour leur stratégie internationale.
Je conclurai ce rapide survol de mon parcours dans l'assurance en mentionnant d'une part une incursion dans le monde de la sécurité sociale – j'ai exercé à Reims, pendant trois ans, simultanément les fonctions de directeur général d'une caisse régionale de Groupama et de directeur général d'une caisse de la Mutualité sociale agricole –, d'autre part mes responsabilités à la Fédération française des sociétés d'assurances – FFSA –, dont j'ai été vice-président, et à la Fédération française des sociétés d'assurance mutuelles – FFSAM –, que j'ai présidée.
Je vous dirai maintenant pourquoi je suis candidat aux fonctions de vice-président de l'ACPR et ce que je pense pouvoir apporter à l'Autorité si ma candidature est retenue. J'ai pour habitude de m'investir complètement au service des entreprises pour lesquelles je travaille et, au long de ma carrière professionnelle, j'ai surtout eu l'occasion de défendre des intérêts particuliers ou, lorsque j'ai eu des responsabilités à la FFSA, des intérêts catégoriels. Pour cette ultime étape de ma carrière, je serais très heureux de passer de la sphère privée à la sphère publique et de mettre mon expérience de l'entreprise au service d'une institution qui exerce ses missions au nom de l'intérêt général.
L'ACPR, autorité indépendante adossée à la Banque de France, a pour mission principale de veiller à la préservation de la stabilité du système financier et à la protection des clients de la banque et de l'assurance. Elle est présidée par le gouverneur de la Banque de France et, depuis la fusion, en 2010, des instances de supervision de la banque et de l'assurance, les textes prévoient que son vice-président doit avoir une expérience professionnelle dans l'assurance. C'est à cette fonction que je suis candidat. Il me semble en effet que mon parcours professionnel, tout entier consacré à l'assurance, m'a préparé à exercer cette responsabilité. Les différents postes que j'ai occupés au sein de trois groupes français – un assureur mutualiste, une institution publique, un bancassureur –, les responsabilités que j'ai exercées dans la profession et les clients que j'ai accompagnés en ma qualité de consultant m'ont permis d'acquérir une expérience approfondie et une vision transversale du monde de l'assurance en France.
Si ma candidature était retenue, je pourrais apporter à l'ACPR mon expérience et mes compétences dans plusieurs domaines : une longue pratique des principaux métiers de l'assurance, de la bancassurance et de l'assurance vie en France ; une connaissance des marchés et des acteurs de l'assurance et de la bancassurance, en France et à l'étranger ; une expérience confirmée de la direction générale de sociétés ou de groupes d'assurance de tailles très diverses, en France et à l'étranger ; une expertise plus spécifique, toujours dans l'assurance, pour ce qui touche à la réflexion stratégique, à l'international, aux fusions et acquisitions ainsi qu'à la création de nouvelles sociétés d'assurance.
Sous l'impulsion du Parlement, le rôle essentiel de l'ACPR dans la régulation des secteurs de la banque et de l'assurance en France s'est beaucoup renforcé à la suite de la crise bancaire de 2008. Un cadre réglementaire prudentiel rénové, dont les orientations sont définies au niveau international et européen, se met en place par étapes. La transposition en droit français de la directive CRD4 et l'entrée en vigueur du mécanisme de supervision unique constituent pour le secteur bancaire une avancée considérable. Dans l'assurance, la transposition de la directive-cadre Solvabilité II est effective depuis la publication, début avril, du décret et de l'arrêté d'application, si bien que Solvabilité II pourra entrer en vigueur le 1er janvier 2016.
Ce cadre réglementaire neuf impose aux banquiers et aux assureurs de nouvelles exigences et confère au superviseur des leviers d'action beaucoup plus nombreux et plus puissants pour faire appliquer et respecter les normes prudentielles. Ces progrès remarquables ont déjà permis d'apprécier beaucoup plus justement les risques auxquels les banques et les sociétés d'assurance sont confrontées et de mieux calibrer les exigences de fonds propres.
Tous les acteurs concernés – les régulateurs à l'échelon national et à l'échelon européen, les banquiers, les assureurs et leurs organisations professionnelles, le Parlement – ont accompli un travail immense pour élaborer, tester et adapter ces nouveaux dispositifs à la réalité du terrain. Il faut à cet égard saluer la qualité des équipes de l'ACPR, unanimement reconnue en France et à l'étranger ; elles ont joué un rôle majeur pour que les nouvelles normes prudentielles européennes deviennent réalité.
Cela ne signifie pas que les défis à relever ne demeurent pas nombreux. Le nouveau dispositif réglementaire prudentiel est particulièrement performant mais il est aussi sophistiqué et complexe. Il ne produira les effets positifs que nous en attendons que si nous savons instaurer entre contrôleur et contrôlés un dialogue étroit et confiant afin de procéder, en marchant, à la nécessaire adaptation de cet outil à la réalité de l'entreprise et aux véritables besoins de la régulation.
Si je rejoignais l'ACPR, j'exercerais mes nouvelles responsabilités au sein du collège de supervision en toute indépendance et j'aurais évidemment à coeur le respect des textes et leur application rigoureuse. Mais je m'efforcerais aussi de rappeler que la véritable efficacité du nouveau cadre prudentiel se mesure d'abord au niveau de l'entreprise, lorsque celle-ci le met à profit pour mieux gérer ses risques, c'est-à-dire pour mieux faire son métier.