Je ne saurais vous dire non plus quelle est la position de l'ACPR sur les sociétés de recouvrement.
Votre question à propos du Luxembourg et de l'Irlande, monsieur Carré, m'amène à vous dire qu'il est choquant pour l'Européen que je suis de constater la persistance des écarts de la fiscalité applicable aux entreprises au sein de l'Union européenne, de surcroît dans des États qui ont une même monnaie ; aussi longtemps qu'il en sera ainsi, on pourra difficilement empêcher une banque ou une société d'assurance de créer des filiales dans les pays où la fiscalité est la plus favorable. Sur un autre plan, certaines banques et sociétés d'assurances françaises distribuent en France des contrats d'assurance vie produits par leurs filiales luxembourgeoises respectives, mais ces contrats sont soumis aux mêmes règles que les contrats émis par les sociétés d'assurance vie françaises : le client a les mêmes contraintes et les mêmes bénéfices. Il est vrai que la réglementation luxembourgeoise permet certains avantages qui ne sont pas autorisés en France, telle la détention de titres vifs dans un contrat d'assurance vie. La réglementation française est plus prudente sur ce point ; selon moi, c'est préférable. Si j'accédais à la vice-présidence de l'ACPR, j'examinerais le sujet de près pour apprécier si l'Autorité peut intervenir davantage.
Monsieur Rodet, la raison pour laquelle le Crédit Agricole et Groupama ne sont pas parvenus à constituer un grand groupe mutualiste français de la banque et de l'assurance demeurera pour moi une question sans réponse, alors même que j'étais aux premières loges. Dans un premier temps, le banquier et l'assureur des agriculteurs ont essayé de faire cause commune : Groupama était présent dans les filiales du Crédit Agricole, et cette longue histoire a débuté par une collaboration étroite. Puis la puissance de distribution de la bancassurance a fait que les points de vue ont divergé et les deux groupes en sont venus à se concurrencer alors qu'ils auraient sans doute dû trouver une alliance pour le plus grand bénéfice des régions françaises.
Cela rejoint d'ailleurs le sujet évoqué par M. Fauré : les groupes mutualistes sont écartelés entre leur idéal originel – exclusivement la défense de leur sociétaires – et leur transformation en des groupes bancaires ou des sociétés d'assurance d'une importance économique gigantesque, ce qui les soumet aux règles de la concurrence. Ils hésitent de ce fait entre leur comportement d'acteur de marché et leur histoire mutualiste, deux options difficiles à concilier. Je regrette de n'avoir pu faire davantage pour favoriser le rapprochement entre Groupama et le Crédit Agricole.