Intervention de Gérard Rameix

Réunion du 20 mai 2015 à 16h15
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Gérard Rameix, président de l'Autorité des marchés financiers :

On peut en tout cas redouter que les épargnants traditionnels soient écartés des marchés, car les marges y seraient écrêtées par des spécialistes. La frontière entre l'habileté et la manipulation est cependant difficile à établir avec netteté. L'autre risque est celui que, dans des conditions exceptionnelles, ces algorithmes dysfonctionnent et conduisent à un accident de marché. Mais nous n'avons pas encore diagnostiqué d'algorithme présentant comme tel ce danger.

En matière de gouvernement d'entreprise, nous voulons un respect des règles. Certains esprits forts prétendent que l'obligation de transparence a plutôt été un facteur accélérateur dans le domaine des rémunérations. L'assemblée générale des actionnaires intervient désormais dans le processus. L'AMF s'attache à vérifier que l'information fournie était honnête et que les critères ainsi fixés ex ante sont bien respectés.

S'agissant des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire, le risque que le financement bancaire ralentisse pour elles peu à peu n'est pas à écarter, même s'il ne se réalise pas pour le moment. L'encours des crédits qui leur sont accordés progresse même de 1 % à 2 % par an. L'accès au financement n'est donc pas un frein considérable à la croissance. Pour développer une solution alternative au financement bancaire, le secteur du capital-risque, déjà fort en France, doit encore se développer, même si les banques et assurances sont moins enclines à prendre des risques dans ce secteur du fait des contraintes prudentielles. La Banque publique d'investissement a cependant stimulé les opérations en ce domaine.

Ensuite, le marché obligataire s'ouvre à des entreprises de plus petite taille, grâce aux euro private placements ou Euro PP, ou encore aux Schuldscheine en Allemagne. Comme régulateur, l'AMF suit ce développement de près, car le risque est plus fort pour l'épargnant. La titrisation offre une dernière possibilité, mais ce ne devrait pas être sur ce terrain qu'elle se développe le plus rapidement. D'autres créances bancaires sont plus faciles à titriser. Les crédits octroyés aux entreprises méritent à mes yeux de garder plutôt leur place dans le bilan des banques. Il ne faudrait cependant pas exclure la vente de paquets de créances sur des entreprises de taille intermédiaire, qui seraient vendues en lot, comme le droit le permet.

Enfin, des gérants d'actifs proposent désormais des fonds de prêts. L'épargnant qui achète une part dans un organisme commun de placement est averti qu'elle sera utilisée à des fins de rachat de créances d'entreprises ou d'autres créances. Comme en matière de titrisation, l'AMF veille à la prévention des conflits d'intérêts entre le gérant du fonds et l'émetteur de la créance. Les solutions se développent. Il y a donc plusieurs réponses au besoin de financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire.

Quant au financement participatif ou crowdfunding, nous mettons en oeuvre le dispositif législatif adopté l'an dernier, en examinant les demandes d'agrément de conseillers en investissement participatif, qui peuvent mener ces opérations avec des fonds propres limités et sous réserve de certaines obligations de transparence. Sur le fondement de certaines expériences nationales, telle l'expérience britannique, un cadre européen pourrait voir le jour. Pour l'instant, le cadre français doit se développer sans faire naître de plaintes de la part des investisseurs qui perdront leur mise. Car ces opérations sont risquées. Nous devons attirer l'attention des investisseurs sur ce point, en les invitant à réfléchir à la part de leur patrimoine qu'ils doivent y consacrer, mais aussi à diversifier leurs placements, car les taux de rendement seront très inégaux. Un apprentissage reste donc à faire. Le cadre actuel mérite cependant d'être conservé.

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