Je vous prie d'excuser Gilles Carrez, président de la commission des finances, qui ne peut être présent parmi nous ce matin.
En juin 2013 nous avions, lors d'une audition à laquelle s'était aussi jointe la commission des affaires étrangères, entendu M. Mario Draghi, mais c'est la première fois que nous avons un échange de vues avec un autre membre du directoire de la BCE. Alors que l'Europe sort d'une récession de trois ans qu'elle a créée de toutes pièces, il est intéressant d'entendre l'éminent économiste que vous êtes, d'autant que vous avez contribué, auprès de M. Draghi, à la mise en oeuvre d'une politique, dite de « quantitative easing », qui a permis de sortir partiellement l'Europe de l'ornière.
Sur le problème grec, l'Europe ne doit pas reproduire les erreurs de l'histoire, notamment celle qui consiste à croire que l'on peut faire payer un pays pour ses erreurs sans que cela ait des conséquences pour les autres. L'Europe avait tiré les enseignements d'une telle erreur : l'ensemble des pays qui la composent, Grèce incluse, s'étaient ainsi entendus, en 1953, pour alléger la dette allemande, qui représentait alors 60 % du produit intérieur brut (PIB). Sur ce point, on a un peu oublié l'histoire en tardant à réagir à la crise grecque, alors même que la zone euro, prise dans son ensemble, était bien moins endettée que les États-Unis ou le Japon.
La seconde leçon que l'on peut tirer de la récession dont l'Europe est heureusement en train de sortir, c'est que, tous les politiques et les économistes en conviennent, l'union monétaire n'a pas de sens sans solidarité ; faute de quoi elle se résume à l'ouverture d'un grand marché non piloté par une politique macroéconomique essentielle, notamment, en période de crise. Les politiques qui ont été suivies – fortes réductions de dépenses publiques ou baisses du coût du travail – sont sans doute pertinentes à l'échelle d'un pays mais, généralisées à tous les pays, elles ont un effet récessif qui pèse sur les efforts budgétaires et annule, au niveau de la zone euro, les gains de compétitivité. Une coordination est donc nécessaire, y compris sous la forme d'un gouvernement économique de la zone, comme l'a indiqué le président de la Commission européenne à l'occasion d'échanges interparlementaires.