Intervention de Alain-Gérard Slama

Réunion du 22 mai 2015 à 9h00
Groupe de travail sur l'avenir des institutions

Alain-Gérard Slama :

Ce terme de « démocratie immédiate » est intéressant : vous accordez une grande importance à la lisibilité du système ; il vous paraît donc essentiel que l'ensemble du vaisseau de la démocratie avance dans la même direction, depuis le poste de commandement dyarchique jusqu'aux passagers que sont les commissions. Mais, dans ce schéma, que reste-t-il d'un projet à long terme ? Vous dites que les précautions prises en 1958 pour lutter contre l'instabilité gouvernementale de la Quatrième République ne sont plus nécessaires : permettez-moi de ne pas être d'accord. J'ai donc peur que votre pari du monolithisme ne soit pas tenu.

La question du suivi des fluctuations de l'opinion publique me paraît la plus préoccupante : comment votre bâtiment pourra-t-il tenir un cap ? Vous vous libérez, de plus, des contraintes de l'article 40, qui tient les élus en tutelle, puisque, dans votre schéma, les commissions sont co-créatrices de la loi. Alors que nous nous battons ici pour que les parlementaires aient plus souvent l'initiative, pour qu'il y ait au Parlement davantage de politique, et donc pour réconcilier le pays avec la politique, le risque n'est-il pas d'en arriver à un système platonicien, dans lequel un gouvernement technique apportera des réponses techniques à des problèmes techniques, et où il serait très difficile qu'un Premier ministre incarne une véritable politique ? Je crains que nous n'en arrivions à un système où le politique se dissoudrait dans la négociation et la discussion permanente. Comment alors mettre en évidence les choix, les projets ? Il faut pour cela accepter le conflit.

La notion de conflit est au coeur de la pensée politique française, ce qui n'est pas le cas des pays que vous prenez comme modèles, notamment l'Allemagne, où l'on apprécie le consensus. Autrement dit, je vois, en vous écoutant, s'engloutir la gauche et la droite et j'ai envie de leur tendre la main pour les ramener à bord…

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion