Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, chers collèges, le texte qui arrive devant nous aujourd’hui, dans une certaine indifférence générale – à observer le nombre de députés présents ! – revêt cependant un caractère capital pour nos territoires ultramarins. Le consensus, au-delà des affinités partisanes, qui prévaut au sein de notre assemblée comme cela a été le cas au Sénat, en est la meilleure preuve.
Certes, ce régime dérogatoire au droit commun, qui a précédé la République, est décrié par une partie de la classe politique et vu d’un oeil peu favorable par les instances communautaires. Faut-il rappeler que c’est bel et bien un mal nécessaire à la compétitivité de nos entreprises, de nos économies et au développement, bon an mal an, de nos productions locales ?
Vous le savez, madame la ministre, je vous soutiens pleinement dans la démarche qui est la vôtre et connais votre ténacité à faire reconnaître à Bruxelles l’importance de ce dispositif – qui s’est révélée payante, puisque la décision no 9402014UE du Conseil reconduit le dispositif de l’octroi de mer jusqu’en décembre 2020.
Il faut aussi reconnaître le travail qui a été fait concernant le marché unique Antilles-Guyane, qui a permis de parvenir à un certain nombre de compromis et de solutions consensuelles – bien qu’à titre personnel, je le répète, j’y sois tout à fait défavorable, comme vous l’aurez noté, par ailleurs, à la lecture de mes amendements.
C’est pourquoi, si je soutiens votre démarche, je me dois de vous annoncer d’ores et déjà que je ne pourrai – une fois n’est pas coutume – apporter mon suffrage au projet de loi, tel qu’il est présenté aujourd’hui. Le point de blocage ne concerne pas le fameux marché unique Antilles-Guyane, qui a fait couler tant d’encre, mais l’article 32 du texte, qui perpétue une discrimination insupportable vis-à-vis des communes guyanaises et de celles de Mayotte, pourtant déjà parmi les plus mal loties de France.
Pour ce qui est de la Guyane, les dispositions de cet article 32 entérinent tout simplement la ponction sur les recettes issues de l’octroi de mer de 27 millions d’euros par an au profit du conseil général de la Guyane, et demain certainement de la collectivité territoriale de Guyane.
Pourtant, cette disposition est manifestement anticonstitutionnelle, car contraire à l’autonomie financière des collectivités, laquelle découle du principe de libre administration des collectivités territoriales. Je me permets de vous rappeler que l’État ne peut en aucun cas supprimer des ressources fiscales des collectivités sans compensation. C’est pourtant bien ce que prévoit cet article 32 pour les collectivités que sont les communes guyanaises et mahoraises.
Madame la ministre, en tant que maire de la commune de Matoury, commune surendettée dont le préjudice annuel du fait de ces dispositions s’élève à 3,3 millions d’euros, ce qui représente environ 10 % de son budget de fonctionnement, je suis favorable à ce que l’association des maires de Guyane engage une action en responsabilité contre l’État dans le cadre d’un recours de plein contentieux. J’ai d’ailleurs moi-même déposé des amendements qui tendent à supprimer le dispositif litigieux, mais j’avoue que j’ai peu d’espoir quant à leur adoption.
Il nous faudra pourtant trouver une solution satisfaisante à très court terme.