Intervention de Stéphane Travert

Réunion du 26 mai 2015 à 17h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Travert :

Monsieur le président du CSA, nous vous remercions d'être aujourd'hui devant la représentation nationale et la commission des affaires culturelles et de l'éducation pour répondre aux nombreuses questions qui, je n'en doute pas viendront ponctuer une séquence riche et importante dans la vie de l'audiovisuel public de notre pays.

Les commentaires consacrés, dans les médias et la sphère politique, aux dernières nominations effectuées par CSA méritent, en effet, que notre commission puisse vous entendre afin de clarifier les choses utilement et de clore ainsi une polémique qui voudrait remettre en cause l'esprit de la loi du 15 novembre 2013 qui garantit l'indépendance du service public audiovisuel auquel nous sommes tous très attachés.

Monsieur le président, vous le savez, l'audiovisuel public est traversé par des doutes sur son avenir et il s'interroge. Quelle est sa capacité à assumer son rôle ? Comment remplir les missions de service public fixées dans les contrats d'objectifs et de moyens ? Comment répondre aux défis multiples que sont la diversité, la parité, le respect des opinions, la laïcité, le renouvellement des programmes, l'adaptation de ceux-ci à une société en perpétuelle évolution, la promotion de nouveaux talents ? Comment faire de l'audience sans sombrer dans le populisme et les sujets faciles à outrance ? Comment faire le lien entre la jeunesse d'aujourd'hui et sa lecture de l'histoire et des événements pour créer les conditions qui font de l'audiovisuel public un garant du vivre ensemble ?

En d'autres termes, comment le CSA peut-il être le vecteur permettant de réguler un monde où l'ère numérique, l'immédiateté, la recherche du « buzz » et l'écume des événements ont pris le pas, dans certains médias, sur une véritable éditorialisation de l'actualité ?

Mais d'autres défis attendent également le CSA et le touchent directement. Comment garantir l'indépendance du service public audiovisuel à travers les modalités prévues par le Conseil pour veiller à la bonne mise en oeuvre des contrats d'objectifs et de moyens et poser des garde-fous aux missions qui incombent aux dirigeants des groupes de l'audiovisuel ?

Après les nombreuses semaines de grève qu'a connues le groupe Radio France, c'est au tour de France Télévisions et du CSA d'être pointés du doigt suite à la décision du Conseil de nommer Mme Delphine Ernotte à la présidence du groupe pour succéder à M. Rémy Pflimlin.

Nous entendons depuis quelques jours les cris de celles et ceux qui voudraient réécrire l'histoire à leur façon. Ce sont les mêmes qui, comme on le fait d'un fichier numérique, voudraient effacer de la mémoire collective ce qu'ils avaient auparavant institué : un audiovisuel public aux contours proches de l'ORTF à la sauce nouvelle vague. D'ailleurs cette vague n'est jamais venue…

Revenons à cette histoire pas si ancienne d'un Président de la République passionné par les médias – les membres de cette commission ne sauraient lui en tenir en rigueur –, qui voulait tout à la fois, profitant du statut qui l'avait placé au plus haut grade de l'État, être celui qui nomme et révoque selon son bon vouloir les dirigeants des groupes de l'audiovisuel public, mais aussi le présentateur, le programmateur, le spectateur, le commentateur, le coordinateur, le régisseur, l'animateur… (Exclamations sur les bancs du groupe du groupe UMP.) Le dictionnaire des rimes n'y suffirait pas !

Outre les responsabilités qu'il s'attribuait en matière d'audiovisuel public, contraignant ainsi l'indépendance de ce dernier, il le fragilisait encore davantage en supprimant d'un trait de plume, et sans débat, une part importante de ses ressources provenant de la publicité.

Aujourd'hui, ceux qui ont soutenu ces démarches ont beau jeu de demander une commission d'enquête parlementaire alors que c'est le rôle de notre commission de vous interroger, monsieur Schrameck, sur votre analyse de la séquence qui a vu la nomination de Mme Ernotte à la présidence de France Télévisions.

La majorité a redonné le premier rôle au CSA par la loi du 15 novembre 2013 en lui conférant le pouvoir de nomination des dirigeants de l'audiovisuel public. Une décision prise par une autorité indépendante est nécessaire et indispensable aux présidents et présidentes de chaînes qui portent l'avenir des plus grosses entreprises culturelles de France avec presque 30 % de l'audience globale de la télévision française.

Monsieur le président, quel bilan faites-vous des modalités de désignation du président de Radio France puis de celles ayant permis la nomination de Delphine Ernotte ? Ces modalités, comme le respect de l'anonymat des candidatures ou l'ouverture à tous les champs de compétences, permettent-elles une prise de décision optimale pour l'avenir de l'audiovisuel public ? Quelles modifications pourriez-vous proposer dans le champ de compétence dévolu au CSA ?

La nomination d'une femme à la tête de la plus importante entreprise culturelle de France – c'est une première qui vaut tout de même un satisfecit –, ouvre-t-elle une nouvelle ère pour le service public audiovisuel ?

Comment résoudre les difficultés créées par les fuites, volontaires ou non, qui ont porté un coup à l'équité et aux garanties d'indépendance du CSA ?

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