Intervention de Jean-Yves le Drian

Séance en hémicycle du 4 juin 2015 à 9h30
Programmation militaire pour les années 2015 à 2019 — Présentation

Jean-Yves le Drian, ministre de la défense :

Les « restrictions légitimes » concernent plus particulièrement le droit de grève, de manifestation ou de retrait, ou encore les actions collectives de la part des militaires engagés dans des opérations, notamment extérieures.

Il importe que cette avancée majeure pour la condition militaire soit accompagnée et acceptée par toute la communauté militaire. C’est la raison pour laquelle elle ne doit ni heurter, ni précipiter, mais au contraire rassurer sur le fait qu’elle ne remet en cause ni les obligations fondamentales de nos armées, ni l’unicité du statut militaire.

En septième lieu, je souhaite appeler votre attention sur la nouvelle politique des réserves engagée dans ce projet de loi. Il s’agit notamment d’associer davantage les réserves opérationnelles au renforcement de la posture de protection de nos armées, qu’il s’agisse des déploiements ou de la cyberdéfense. C’est pourquoi le projet de loi engage un effort sans précédent au profit de la réserve opérationnelle.

La loi fixe un objectif pour le nombre de réservistes, qui passe de 28 000 à 40 000, en favorisant un élargissement des recrutements vers la société civile. Cette ambition est forte, tout en demeurant réaliste. Elle en tout cas nécessaire aujourd’hui et les chefs d’état-major y sont résolus.

Dans la même perspective, il est prévu, en cas de crise menaçant la sécurité nationale, d’améliorer les conditions d’appel des réservistes opérationnels. Ces dispositions ont fait l’objet, à ma demande, de concertations avec le MEDEF afin de tenir compte des besoins des entreprises, avec l’objectif de n’avancer qu’après le dialogue – ce qui a été fait. Outre une augmentation du budget dédié à la réserve de 75 millions d’euros sur la période 2016-2019, des partenariats avec les entreprises devront concourir à cet objectif.

En huitième lieu, au titre du lien entre l’armée et la nation, je souhaite souligner l’expérimentation en métropole d’un service militaire volontaire, conformément au souhait exprimé par le Président de la République. Il s’inspirera du service militaire adapté dont vous savez qu’il a fait ses preuves dans les outre-mer.

Ce dispositif, souhaité par le Chef de l’État dès cette année, doit contribuer à l’insertion de jeunes en situation difficile en les aidant à accéder à l’emploi. Il s’agit d’un dispositif militaire porté par l’armée de terre, en partenariat avec des entreprises et des acteurs régionaux de l’emploi et de la formation. Deux centres accueilleront des jeunes en service militaire volontaire dès la rentrée 2015 : Montigny-les-Metz, en Moselle, et Brétigny-sur-Orge dans l’Essonne. Un troisième centre, qui sera établi à La Rochelle, complétera en 2016 l’expérimentation en accueillant un millier de volontaires.

Ce dispositif s’intègre naturellement dans un ministère dont la tradition et l’exemplarité en matière de lien entre les armées et la jeunesse n’est plus à démontrer : près de 20 000 jeunes recrutés par an, 6 000 stagiaires en service militaire adapté outre-mer, 750 000 participants chaque année à la journée défense citoyenneté, 10 000 stagiaires de tous niveaux et 30 000 jeunes accueillis dans le cadre du plan égalité des chances.

En plus de ce service militaire volontaire que nous créons et des missions que je viens d’évoquer, le ministère de la défense diversifiera et augmentera le nombre de missions de service civique qu’il propose, conformément à la décision du Président de la République de porter à 70 000 jeunes dès 2015 et 150 000 jeunes en 2016 le nombre de volontaires du service civique, désormais universel. Dans ce cadre, le Gouvernement présentera un amendement au projet de loi de programmation militaire visant à permettre à l’Agence du service civique d’assurer la montée en charge du dispositif et de mettre en oeuvre le volet jeunesse du programme européen Erasmus + qui facilite la mobilité des jeunes de treize à trente ans en Europe.

Enfin, afin d’éviter tout malentendu ou erreur d’interprétation, je tiens à souligner encore une fois que la transformation en cours du ministère, dans pratiquement toutes ses composantes, ne va pas s’arrêter. Au contraire. La montée en puissance de nos moyens, par exemple l’augmentation des effectifs de la FOT, ne peut que nous inciter à accentuer les réformes qui portent modernisation du ministère et des forces armées. Ainsi, les suppressions de postes destinées à gager les capacités nouvelles ou à accompagner des restructurations se poursuivront. En outre, le projet de loi intègre désormais les plans stratégiques de chaque armée et de chaque grand service. Il s’agit des programmes « Au contact ! » de l’armée de terre, « Horizon marine 2025 » de la marine, « Unis pour faire face » de l’armée de l’air, « SSA 2020 » pour le service de santé des armées, et enfin « SCA 2021 » pour le service du commissariat des armées. L’objectif à atteindre pour 2020 est désormais clair pour tous.

Mesdames et messieurs les députés, j’ai ouvert mon propos en insistant sur la gravité des menaces que nous devons affronter aujourd’hui et qui se poursuivront, malheureusement, dans les années à venir. Face aux urgences opérationnelles, les armées ont répondu présent lors de la mobilisation sans précédent, par son ampleur et sa rapidité, qui a suivi les attentats de janvier. Elles l’ont fait en dépit de toutes les difficultés qui ont pu se présenter, en faisant preuve de courage, de professionnalisme et d’une abnégation à toute épreuve.

Aujourd’hui nos soldats ont besoin de votre soutien, tel qu’il est décliné dans cette actualisation de la loi de programmation militaire, pour continuer de remplir les missions qui leur sont confiées. Je souhaite vivement une mobilisation de tous, du Gouvernement comme du Parlement, c’est-à-dire de la nation dans toutes ses composantes, qui sait se rassembler lorsque l’essentiel est en jeu.

Cette actualisation est à la hauteur des enjeux. Jamais une telle inflexion, en termes de ressources humaines et de finances, n’avait été décidée en cours de programmation. Jamais, non plus, la place des militaires au sein de la société, dans la spécificité mais aussi la plénitude de leur citoyenneté, n’avait été reconnue au point rendu aujourd’hui possible par la création des associations professionnelles nationales de militaires. Ma conviction est que ce sont là deux décisions appelées à faire date dans l’histoire de notre défense. Je vous remercie de votre attention.

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