Mais si ! Si des industriels n’avaient pas construit les avions, à qui reviendrait le mérite de les vendre ? La multitude de leurs sous-traitants se trouve aussi récompensée. Nous devons mêler nos félicitations et nos remerciements à ceux qui leur ont été déjà exprimés.
On sait, monsieur le ministre, que vous vous êtes beaucoup impliqué et l’on doit saluer votre action. Il faut dire qu’outre cette belle percée industrielle, la vente de nos Rafale sauve d’une mort certaine la programmation militaire : on n’imagine guère que nos ressources budgétaires auraient permis de maintenir en activité la chaîne de production des avions !
Il faut saluer enfin la part qu’y ont prise les personnels de l’armée de l’air – mais peut-être cela vous gêne-t-il aussi ? Ce sont eux qui, au prix d’une implication extraordinaire, ont su mettre en valeur le système d’armes Rafale. C’est la raison pour laquelle, monsieur le ministre, il serait difficilement compréhensible que l’armée de l’air ait à supporter les conséquences notablement fâcheuses des marchés d’exportation qu’elle a largement contribué à gagner.
Vous l’aurez sans doute compris, monsieur le ministre, nous pensons que le volet budgétaire de votre projet de loi d’actualisation de la LPM, en dépit des éléments positifs qu’il contient, n’est pas à la mesure des besoins et des attentes de nos forces armées.
Beaucoup trop d’équipements sont dans un état de vétusté, et même de déclassement opérationnel, qui impose leur renouvellement accéléré. Le maintien en condition des matériels, pour lequel vous avez fait un effort, monsieur le ministre, l’entraînement des personnels, la vie courante dans les unités sont soumis à des contraintes financières qui ne sont supportées par aucune autre des institutions de l’État.
La précarité et l’instabilité des ressources financières, ajoutées à l’usage immodéré que vous persistez à faire de financements virtuels, voire spéculatifs, confèrent à votre budget un caractère irréaliste, et ce depuis 2013.
Pour faire court, monsieur le ministre vous vous inspirez du Sapeur Camembert, figure sympathique de notre Panthéon militaire : lui s’échinait à déplacer les trous, l’un rebouchant l’autre, et vous, avec la même constance, vous appliquez à déplacer les virtualités budgétaires, lesquelles d’ailleurs ressemblent fort à des trous en devenir.
Monsieur le ministre, j’ai centré mon propos sur les deux piliers sur lesquels se construisent toutes les lois de programmation militaire : les ressources humaines et la ressource financière.
En matière d’effectifs, vous corrigez à l’économie la très mauvaise évaluation que vous aviez faite en 2013 des besoins capacitaires de nos forces armées, singulièrement de l’armée de terre. Nous vous avions mis en garde, hélas en pure perte. Sur le plan budgétaire, vous vous révélez impuissant à donner une réelle crédibilité à vos engagements financiers. Mais pire encore, vous présentez un budget notoirement insuffisant au regard des besoins qui s’expriment au quotidien dans nos armées, notamment sur les théâtres d’opération où vous avez pris la responsabilité de les engager.
A l’examen de ce projet d’actualisation, de cette LPM Canossa, on a l’impression que vous n’avez qu’une obsession, monsieur le ministre : tenir jusqu’en 2017, en nourrissant la fiction que vous honorez vos engagements. Plus personne, surtout au sein de nos armées, ne croit à cela.
Si vous aviez confiné nos forces armées dans leurs cantonnements, dans leurs ports ou sur leur base, avec une activité minimale, peut-être auriez-vous pu organiser leur survie dans le cadre de votre LPM. Mais ce n’est pas le cas. Vous usez nos forces armées et le résultat sera dévastateur pour notre défense. C’est le Président de la République qui a décidé de leur emploi ; c’est donc à lui seul qu’incombe la responsabilité de donner aux armées, dont il est le chef, les moyens dont elles ont besoin.
L’engagement de la France dans la lutte contre le terrorisme djihadiste, en position très avancée, a pour conséquence d’exposer notre pays à un ensemble de risques grandissants. Nous sommes donc appelés à un effort considérable de mise au meilleur niveau de nos forces de sécurité, notamment pour ce qui concerne nos armées. Cet effort ne transparaît pas à la lecture de votre projet de loi.
Nous vous avions mis en garde en décembre 2013, nous n’avons pas été écoutés. Les événements de janvier ont montré que vous aviez eu tort de ne pas le faire. Nous alertons de nouveau. L’actualisation de votre LMP devait être l’occasion de corriger les insuffisances criantes du projet voté en 2013. Dire que ce n’est pas le cas est une litote.
La République doit assurer aux citoyens la sécurité. Elle doit apporter à ses soldats les meilleurs moyens qui soient pour remplir leur mission. Elle doit aussi leur témoigner sa considération et sa reconnaissance. Votre projet ne correspond à aucune de ces exigences. Les Républicains ne vous accordent par leur confiance et vous demandent de retirer votre projet.