Ce rapport est très pertinent et montre toute la difficulté d'une doctrine. L'opération sur Kolwezi était une opération d'exfiltration de ressortissants dans un contexte extrêmement complexe avec des moyens limités. En Afghanistan, nous sommes intervenus en réaction au 11 septembre. L'action de nos troupes a été remarquable. Fallait-il laisser le territoire aux talibans ? Nous avons fait ce que nous devions faire et nous l'avons bien fait, sur le plan strictement militaire ou plus largement. Si la paix est encore fragile, je constate malgré tout que l'Afghanistan a eu des élections présidentielles et législatives, mais il manque encore un développement économique et social, des investissements, malgré un sous-sol riche, gage de prospérité. Je peux donc comprendre les doutes exprimés au sujet de cet engagement.
En Libye, nous sommes intervenus pour contrer une menace à caractère humanitaire. On avait décidé que cela se ferait par une voie aérienne mais on sait que sans forces terrestres, on court à l'échec. L'infanterie reste la reine des batailles et il fallait stabiliser la situation pour éviter les tueries entre factions. On aurait pu réussir avec un gouvernement en place, nous étions tous d'accord. Nous le restons aujourd'hui.
Quant à l'avenir de la défense, il n'est jamais bon que les troupes soient dans la rue. La décision de lancer l'opération Sentinelle était compréhensible après les attentats contre Charlie Hebdo et le magasin casher. Mais on ne peut pas pérenniser cette mission qui n'est pas celle de nos soldats. Je sais bien qu'il est plus commode de se servir de militaires qui ne se plaignent pas, contrairement aux CRS qui se font porter malades, mais ce n'est pas leur coeur de métier. Au demeurant, ce temps de garde puise sur les forces vives.
Enfin, concernant la question du Conseil de sécurité dont nous sommes membre permanent, nous avons des droits et des obligations. Cela nous impose de pérenniser notre force stratégique. Mais nous pouvons nous permettre de faire une pause dans la modernisation des composantes, car avec le dispositif actuel, nous pouvons frapper en tout point du globe. Le débat sur le maintien des deux composantes aérienne et sous-marine devra être posé. Je rappelle que notre force stratégique représente 18 à 20 % de notre budget de défense. Il faut pérenniser cet effort, mais aussi le réajuster.