Je voudrais féliciter nos collègues pour la qualité de leur rapport.
Les écologistes réclament depuis longtemps que l'on consulte le Parlement lorsque l'on projette des forces militaires sur un théâtre extérieur, comme c'est le cas dans d'autres démocraties européennes. Il est accablant que nous ne soyons consultés que quatre mois plus tard et que nous soyons conduits, d'une certaine manière, à cautionner des opérations dont on sait toujours comment elles commencent, mais jamais comment elles finissent.
Je rejoins aussi Jean Glavany sur l'idée qu'il s'agit avant tout d'une question politique. Les interventions militaires découlent de la politique extérieure menée par notre pays, en particulier en matière de développement et de soutien à un certain nombre de régimes. Faut-il rappeler que notre intervention au Mali a fait de nous les obligés de régimes ne brillant pas par leurs vertus démocratiques ? Je pense en particulier à ceux des généraux algériens et de M. Idriss Deby, lui-même aidé par le gouvernement de M. Fillon, alors qu'il ne s'agit pas d'un grand démocrate et que ses troupes sont connues pour leur brutalité et leur sauvagerie difficilement égalables en Afrique. La France s'est livrée à d'autres interventions dont nous aurions peut-être pu nous passer si nous n'avions pas laissé pourrir un certain nombre de situations, comme au Mali.
Dans ce pays, où nous sommes désormais présents, où en est-on ? Le Nord est-il intégré à l'Etat malien ? La question de l'irrédentisme touareg a-t-elle été résolue ? La réponse est non. Même avec le nouveau président, la situation n'est pas des meilleures. En Afghanistan, il n'y aura pas de solution tant qu'on ne réunira pas tous les pays concernés autour de la table, en particulier l'Inde et le Pakistan, dans le cadre d'une conférence régionale. La question du Cachemire est essentielle, et l'Afghanistan sert une base arrière pour les belligérants.
A propos des forces stratégiques, évoquées par notre collègue Teissier, la position des écologistes est constante depuis des décennies. Nous ne sommes pas contre le principe d'une armée ou contre des interventions à l'étranger lorsqu'elles sont nécessaires, mais il faut qu'elles soient intégrées dans un cadre européen. Je m'étonne de n'avoir guère entendu parler de la possibilité d'une armée européenne, à terme, depuis le début de cette réunion. Nous défendons pour notre part l'idée d'une Europe fédérale qui serait capable de se doter d'une politique étrangère et de défense commune. Dois-je rappeler qu'il a fallu faire appel à des troupes de l'OTAN et à un commandement américain lors des crises en ex-Yougoslavie, en particulier au Kosovo ? Ce n'est pas l'Europe qui est intervenue !
Notre pays, malgré ses nombreuses qualités, n'est qu'une puissance moyenne. La France est l'un des seuls pays d'Europe à pouvoir intervenir militairement à l'étranger, du fait des équipements dont elle dispose, et elle se trouve dans une position assez solitaire dans un certain nombre de pays d'Afrique.
Comme François Loncle l'a rappelé, nous n'avons pas tous approuvé l'intervention en Libye. Qu'avons-nous fait au plan politique après cette intervention franco-britannique ? La réponse tient en un mot : rien. Ce pays est devenu un « open-bar » où les terroristes peuvent se servir en toute tranquillité. Le matériel militaire libyen est à la disposition de tous ceux qui veulent bien en acheter. Avons-nous contribué à trouver des solutions pour que les tribus puissent s'entendre ce pays, qui n'en est pas un en réalité, puisqu'il a été créé par le colon, ou bien avons-nous laissé ces tribus s'entretuer ? Nous avons choisi la deuxième solution et il en résulte des métastases, si j'ose dire, dans l'ensemble de l'Afrique.
Le rapport présenté par nos collègues est tout à fait intéressant, mais il ne remet pas en cause un principe que ma famille politique rejette. Tant qu'il n'y aura pas de contrôle du Parlement sur la politique étrangère de la France et qu'elle restera le domaine réservé de l'exécutif, tout cela ne pourra pas fonctionner.