Si l'on ne peut fonder la représentation sur les catégories sociales, c'est précisément pour les raisons que vous avez dites. En premier lieu, nous ne parviendrons pas à nous mettre d'accord sur les catégories à représenter, d'autant que celles-ci évoluent au cours du temps. Par ailleurs et plus fondamentalement, fonder la représentation sur des caractéristiques sociales, c'est supposer que les intérêts servis ou les actions accomplies ne puissent renvoyer à autre chose qu'aux caractéristiques que l'on possède soi-même. Ce n'est pas une position normativement tenable et elle ne permet pas d'organiser nos démocraties. On ne peut nullement exclure en effet que des élus défendent des idées ou des intérêts qui n'ont rien à voir avec les caractéristiques socio-économiques qu'ils possèdent. Prétendre le contraire reviendrait à réduire les agents à des porteurs de traits sociaux, au détriment de leur liberté. Le fait qu'il existe une distorsion dans la représentation ne prouve pas que les catégories sous-représentées voient leurs intérêts négligés. D'où l'idée qu'il faut passer de la présomption à la preuve et s'assurer de l'efficacité des mécanismes de correction. C'est en tout cas ainsi que l'on procède lorsqu'il faut concilier deux impératifs contradictoires. En tout état de cause, il faut éviter les politiques gesticulatoires.