Le droit de veto du Sénat en matière constitutionnelle ne devrait s'exercer que s'agissant des collectivités territoriales, ainsi que du Sénat lui-même. Il n'y a aucune raison pour qu'une réforme portant sur un autre sujet intéresse le Sénat dès lors qu'il est exclu du processus législatif tel qu'il se déroule aujourd'hui. La chambre des territoires pourrait toutefois être associée à la fabrique de la loi en général, mais à la condition, je le répète, que ses amendements soient assez largement adoptés pour mériter d'être discutés par les députés.
Quant au poids qu'il est proposé de donner aux collectivités, je maintiens que leur représentation est rendue inévitable par leur participation à la vie du pays à travers la démocratie locale. En outre, je sais pour avoir été moi-même un élu local que les dynamiques et les problèmes que l'on rencontre à cet échelon transcendent dans une certaine mesure les positionnements politiques. Les élus locaux ont un point de vue spécifique sur les questions économiques, sociales, d'investissement, de grands travaux.
Est-ce trop accorder aux territoires que de leur permettre de l'exprimer ainsi ? Le problème n'est pas là : surtout, est-ce efficace ? Nous souffrons en France d'une maladie constitutionnelle : la recherche permanente, depuis 1789, des équilibres. Le comité Balladur avait ainsi pour objet le rééquilibrage des institutions, mais en quel sens ? Le déséquilibre est partout ; c'est sur son efficacité qu'il convient de s'interroger : permet-il de faire place à des éléments importants ? Je me méfie donc de l'idée qu'une catégorie serait trop ou pas assez représentée par rapport à une autre : je comprends intellectuellement le désir d'une large ouverture mais, du point de vue institutionnel, c'est l'efficacité de la décision politique qui doit primer. Voilà pourquoi je suis favorable au rapprochement entre le CESE et le Parlement – une autre manière d'inclure les intérêts économiques, sociaux et culturels – plutôt qu'à la fusion entre le Sénat et le CESE.