Intervention de Claude Gilbert

Réunion du 20 mai 2015 à 17h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Claude Gilbert, président du comité économique, éthique et social du HCB :

Tout d'abord, il est clair que nous sommes dans un contexte difficile. Les antagonismes sont durement construits. Nous sommes dans un paysage qui a longtemps été caractérisé par une guerre ouverte, et avec une violence très importante dans les propos. La tâche du CEES est a priori une tâche extrêmement difficile. Je vais pourtant reprendre quelques points qui laissent espérer des évolutions positives.

Comme cela a déjà été évoqué, le fait qu'un certain nombre de représentants d'organismes soient revenus signer est un fait extrêmement positif, et nous nous en réjouissons. Je tiens d'ailleurs à saluer ceux qui sont revenus ; ce n'était pas très facile pour eux, mais ils l'ont fait.

L'autre point positif, Christine Noiville l'a souligné, c'est que les personnalités qualifiées sont plus nombreuses. Maintenant elles sont au nombre de six, ce qui change déjà le mode de fonctionnement du CEES pour deux raisons.

Tout d'abord, ce sont des intermédiaires entre les parties prenantes et l'univers de la recherche, notamment l'univers de la recherche en sciences humaines et sociales. Je tiens d'ailleurs à insister sur le fait que les sciences humaines et sociales se sont très largement détournées de cette question des OGM ; question trop chaude, trop difficile, trop conflictuelle, trop difficile à réintégrer dans la réflexion académique… Là encore, c'est un effet extrêmement positif.

Nous avons des nouveaux arrivants, nous avons des distributeurs, nous avons des consommateurs, etc. Lorsqu'on me demande de présenter le CEES et que je dis que nous allons de l'Union Française des Semenciers, du LEEM (Les entreprises du médicament) jusqu'à Greenpeace, France Nature Environnement, les Amis de la Terre, cela surprend considérablement de voir l'ensemble de ces personnes assemblées. Il y a des intermédiaires : les syndicalistes, les associations de familles, l'Office parlementaire qui est représenté en tant que tel ; il y a le comité consultatif national d'éthique. Nous sommes une trentaine de personnes, et je crois qu'un équilibre a réussi à se constituer malgré tout.

Un autre effet positif est le mode de fonctionnement que nous avons adopté. Je suis un nouvel arrivant, mais j'ai réussi, en discutant avec mes collègues, à tirer les leçons de l'expérience de la précédente mandature. Nous avons modifié notre mode de fonctionnement, qui est pour beaucoup fondé sur les groupes de travail. Les plénières sont importantes, mais nous avons des groupes de travail. Nous n'avons plus de responsables de groupes de travail, mais des rapporteurs, qui rapportent régulièrement les travaux qu'ils effectuent dans le cadre de groupe de travail. Cela peut sembler anecdotique, mais ce ne l'est pas forcément. Dans les groupes de travail, nous arrivons à discuter, nous arrivons à échanger, et même ceux qui ont des positions opposées acceptent l'échange. Lorsque nous sommes en plénière, vous le savez mieux que moi, les postures prennent souvent le pas. Ainsi, nous avons réussi finalement à trouver une dynamique qui semble intéressante.

L'autre point qui change considérablement le travail du CEES, c'est que jusqu'à présent le CEES n'avait essentiellement qu'à réagir aux avis du conseil scientifique, sur les aspects des risques sanitaires et environnementaux.

Comme l'a dit Christine Noiville, la directive 2015-412, qui donne la possibilité aux gouvernements de se prononcer par rapport aux OGM sur des critères sociaux et économiques, change complètement la donne. Le champ de compétences qui avait été dégagé dans le cadre du HCB se remplit du fait même de ce changement qui a lieu au niveau européen. Bien entendu, cela nous donne des obligations, qui ne sont pas simples à régler. Nous devons monter en compétences sur les aspects sociaux et économiques : il faut vérifier les méthodes, les analyses qui existent en France et ailleurs.

Un autre point qui nous permet d'être un peu optimistes, est que nous avons évolué sur la façon d'élaborer des recommandations. Vous savez que le CEES émet des recommandations quand le CS émet des avis, c'est une nuance importante. Bien entendu, nous essayons de rapprocher les points de vue, mais, d'une certaine façon, nous sommes sans illusion. Nous cherchons à rapprocher les points de vue, mais on se donne comme objectif beaucoup plus important de faire en sorte que tous ceux qui prennent position développent complètement leurs arguments, exposent complètement leurs arguments, et cherchent, autant que nécessaire, les appuis en termes d'expertise pour appuyer leurs arguments.

Nous, le CEES, nous présentons comme des rassembleurs d'arguments et organisons la confrontation de ces arguments, sans nécessairement prendre position, mais de façon à ce que ceux qui nous sollicitent puissent avoir une vision à peu près complète des prises de positions et des arguments sur telle ou telle question.

Un dernier point qui peut changer aussi le mode de fonctionnement du CEES est que, jusqu'à présent, nous étions un peu enfermés dans un cadre hexagonal, et nous étions un peu également dans les questions des PGM (plantes génétiquement modifiées). La question des PGM est, à raison, au coeur des débats, mais d'autres OGM se profilent à l'horizon, et ils vont poser des problèmes redoutables. Je pense, par exemple, aux OGM présentés pour leurs vertus médicamenteuses. Je pense aussi aux OGM concernant les animaux. Tout cela ouvre un spectre considérable. Nous allons faire l'effort de nous décentrer dans les recommandations par rapport à l'hexagone, de faire sans arrêt des comparaisons, et de ne pas rester focalisés sur les abcès de fixation des débats actuels.

Nous commençons seulement : nous avons eu deux réunions plénières pour le moment, beaucoup de groupes de travail ont été mis en place ; j'ai l'impression que nous arrivons à avoir des échanges constructifs. Nous attendons avec un peu d'impatience d'être saisis pour pouvoir travailler complètement.

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