Intervention de Jean-Marie Guéhenno

Réunion du 4 décembre 2012 à 17h00
Commission des affaires étrangères

Jean-Marie Guéhenno, président de la commission chargée de l'élaboration du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale :

Tout dépend des opérations envisagées. Certaines ont été faites en Afrique avec un impact considérable, pour lesquelles 1 500 hommes seulement ont été envoyés. Je ne veux pas dire que c'est le format qui doit être privilégié, mais que tout dépend des circonstances. C'est pourquoi notre commission réfléchit à des scénarios concrets, qui montrent que si, dans certains cas, il n'est pas sérieux de prétendre intervenir avec 1 500 hommes, dans d'autres on peut très bien l'envisager. Quoi qu'il en soit, la France ne fera pas concurrence aux pays qui peuvent fournir des troupes en nombre.

M. Poniatowski a parlé des Nations Unies. Pour les pays qui, comme la France, sont membres permanents du Conseil de sécurité, c'est un élément de leur autorité non seulement d'adopter des résolutions pour faire prendre des risques à d'autres, mais d'être prêts, parfois, à prendre une part de ce risque. De quelle manière ? Quoique l'on pense de l'arrière-plan politique de l'opération, la conjonction des forces intervenues en Côte-d'Ivoire était assez habile : aux forces de l'ONU, généralement assez statiques, a été adjointe une force de réaction rapide dotée de la capacité d'escalade sans laquelle on ne peut dominer la situation. S'il y avait eu au Congo une force de réaction rapide capable de donner un grand coup au M23 avant qu'il ne s'empare de Goma, la Monusco aurait été perçue très différemment. À l'avenir, la France ne sera pas en concurrence avec le Bengladesh ou le Pakistan pour fournir 10 000 hommes aux Nations Unies ; cela n'aurait pas de sens et ce serait un grand gaspillage de nos ressources. En revanche, si nous sommes capables de fournir « le muscle » qui changerait la posture d'une mission des Nations Unies, notre contribution serait extrêmement appréciée. M. Hervé Ladsous, l'actuel secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, m'a indiqué que c'est exactement ce dont il a besoin. La France a un rôle à jouer en cette matière.

S'agissant de l'effectif souhaitable pour l'armée de terre, le débat demeure. Faut-il une armée de haute technologie ou une armée de nombre ? L'opposition entre les deux options me semble excessive puisqu'à l'avenir, beaucoup d'opérations seront des opérations interarmées. Cela implique une armée modulaire, avec une dominante changeante selon les cas. Ainsi, s'il était question maintenant d'une nouvelle opération dans le Golfe, elle serait différente de ce que fut la première : les opérations seraient bien davantage aéromaritimes que terrestres. Ces évolutions ne signifient pas que la composante terrestre ne compte pas.

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