Je veux me féliciter que l’ensemble des groupes de la majorité se retrouvent autour de la proposition de loi. Cette dynamique va d’ailleurs au-delà, puisque les groupes de gauche qui ne sont pas dans la majorité se retrouvent dans ce texte. J’y vois la preuve, et je le dis à certains de ceux qui nous écoutent, que sur des lois de véritable modernisation de la protection sociale, nous pouvons rassembler.
Monsieur Gosselin, vous avez posé des questions auxquelles nous devons apporter des réponses précises. Vous avez avancé l’argument de la judiciarisation, un argument que l’on entend beaucoup dans la société française, notamment depuis que le principe de précaution a été introduit dans la Constitution, à l’initiative du président Jacques Chirac.
Que ce soit clair : nous ne créons pas de nouvelles incriminations, nous facilitons l’accès aux droits existants – ce qui est très important. Nous permettons aux citoyens d’exercer des droits qui leur sont déjà reconnus, ce que la complexité, la longueur, et peut-être le coût des procédures ne leur permettent pas toujours aujourd’hui. Je voudrais insister sur le fait que dans ses articles 7 à 9, la proposition de loi prévoit qu’une médiation peut intervenir entre les titulaires de l’action et le défendeur à tous les stades de la procédure – avant, mais aussi après la saisine du juge.
Vous avez repris l’idée, avancée par des esprits sans doute très rétifs à une évolution du droit international, que nous serions en train de tomber dans le droit anglo-saxon. C’est d’autant moins vrai que des dispositifs semblables existent déjà dans le droit continental, en Allemagne, en Hollande ou en Espagne.
Permettez-moi d’insister sur les différences fondamentales entre notre droit et le droit anglo-saxon : les dommages et intérêts servent ici à indemniser, ils ne sont pas punitifs ; l’action est réservée aux associations et aux syndicats, elle ne peut être engagée par les victimes elles-mêmes ; cette action ne modifie en rien le régime et les règles de la responsabilité ; enfin, l’absence de jury populaire et la prédominance du droit pénal en matière de discrimination révèlent une différence des structures mêmes des droits. Cette proposition de loi, monsieur Gosselin, s’inscrit totalement dans la tradition de l’application pénale. Nous ne rejoignons en rien le droit anglo-saxon !
M. Collard s’est livré à une longue digression sur la notion de « similaire ». Lui qui emploie généralement des mots qui désignent – ou prétendent désigner – des « similaires » était tout à coup gêné. Lorsque le sujet porte sur les immigrés, sur les musulmans, ou sur les personnes originaires de tel ou tel continent, et qu’il s’agit de développer tout un discours politique, M. Collard n’éprouve aucun problème à procéder à des amalgames et à reconnaître des « similaires ». Tel Tartuffe, il nous a dit de cacher ces discriminations qu’il ne saurait voir. Mais sans doute y a-t-il une leçon politique plus générale.
Il argumente contre cette proposition de loi en mettant en avant le danger du communautarisme, ce qui sous-entend une certaine lecture de la société, à laquelle je viens de faire référence. En combattant les droits des immigrés, des populations d’origine étrangère, il combat bien plus largement le droit de très nombreux de nos concitoyens victimes de discriminations en raison du genre, d’un handicap ou pour bien d’autres raisons parmi la vingtaine de cas que M. le député Denaja a rappelées. En tenant un tel discours, c’est bien une position anti-égalitaire, que défend M. Collard.
Voilà pourquoi nous sommes très heureux de constater une telle convergence d’intérêts et j’espère que nos réponses seront de nature à lever les interrogations philosophiques du groupe Les Républicains, de sorte qu’il puisse nous rejoindre pour que nous travaillions ensemble autour de cette importante proposition de loi.
Madame la présidente, je vous demande une suspension de séance.