Intervention de Françoise Descamps-Crosnier

Réunion du 2 juin 2015 à 15h45
Commission d'enquête sur la surveillance des filières et des individus djihadistes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançoise Descamps-Crosnier :

Comme mes collègues, je salue le travail réalisé. Cette commission d'enquête a permis à ses membres d'approfondir la réflexion sur la nature du terrorisme djihadiste, qui attire un nombre toujours croissant d'individus. Il importait de compléter les travaux parlementaires conduits ces derniers mois sur cette matière.

La menace terroriste, qui a changé d'échelle ces derniers mois, présente un caractère durable ; notre pays a dû prendre des mesures exceptionnelles pour renforcer ses moyens, afin de mieux prévenir, détecter, identifier et surveiller. Les coopérations indispensables ont été développées, même si on ne peut pas encore évaluer tous les effets de cette politique.

Notre commission se devait également d'apporter une réponse qui dépasse la stricte dimension sécuritaire, car l'attrait du djihadisme témoigne d'un profond malaise dans notre démocratie.

Afin de mieux prévenir la radicalisation, le rapport prévoit d'instituer des référents chargés d'assurer le suivi des personnes concernées et propose de créer un réseau régional de travailleurs sociaux référents spécialement formés à la détection des processus de radicalisation. Ces travailleurs pourraient notamment aider les directeurs d'école à déterminer si un individu mérite d'être signalé à la cellule préfectorale. M. Christophe Cavard promeut l'instauration de cette brigade d'éducateurs, qui deviendraient des interlocuteurs privilégiés des acteurs publics. Cependant, le rapprochement du travail social et de la sûreté publique, même sur une base volontaire comme pour l'échange de données nominatives, pose des questions. Ainsi, de nombreux professionnels n'approuvent pas cette action de signalement, car elle pourrait éroder la confiance qu'ils ont mis des années à construire. Le président de l'Organisation nationale des éducateurs spécialisés (ONES) affirme ainsi que « la radicalisation religieuse est une direction parmi d'autres que peut prendre un jeune en perte de repères. Elle est à mettre en lien avec une quête existentielle particulièrement marquée à l'adolescence ». Il convient de faire montre d'une certaine prudence en la matière.

Le rapport prévoit de distinguer les détenus radicalisés en fonction de leur dangerosité et de leur vulnérabilité dès leur arrivée en prison. Il serait possible de placer certains condamnés à l'isolement, ce qui reviendrait à réhabiliter les quartiers de haute sécurité (QHS) sans le dire. Peut-être serait-il plus opportun de le reconnaître explicitement.

Je me trouve en revanche en accord avec les autres points du rapport.

Enfin, certains collègues et moi-même avons été agacés que le rapport soit – comme l'usage le prescrit – consultable seulement trois jours pour les parlementaires, alors qu'il semble avoir été distribué à la presse. Comme ce vice de fonctionnement touche de nombreuses commissions d'enquête, il conviendrait de transmettre le rapport aux députés.

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