Le sujet que nous abordons ce matin est en effet d'une grande importance. Il a d'ailleurs fait l'objet d'un certain nombre de rapports et d'études, qu'ils proviennent de la Cour des comptes, de l'Institut Montaigne ou du ministère de l'éducation nationale.
Je vois trois raisons de donner la priorité à la petite enfance et à l'école primaire. La première est que toutes les réformes menées par les ministres successifs – je souligne ce dernier mot, afin d'éviter que mon propos ne soit interprété comme polémique – ont davantage porté sur d'autres degrés que l'enseignement primaire : nous avons connu la réforme des lycées, de nombreux débats autour du collège, mais très peu d'évolutions du système éducatif ont touché le primaire. On considérait en effet que tout allait bien à l'école élémentaire, le maillon de la chaîne considéré comme le plus solide.
Or – et c'est la deuxième raison de cette priorité –, même si, grâce notamment à l'implication de ses personnels, l'école élémentaire ne marche pas si mal que cela, elle nécessite tout de même une réforme, parce que c'est là qu'apparaissent des difficultés qui peuvent par la suite devenir insurmontables : une fois l'élève parvenu au collège, il est souvent trop tard. Nous nous trouvons alors devant ces élèves « décrocheurs » qu'a évoqués hier le ministre en annonçant le plan du gouvernement en la matière. Il faut, bien sûr, s'attaquer au problème qu'ils posent, mais il faut surtout anticiper ce « décrochage », éviter dans la mesure du possible qu'il ne se produise. Or il trouve ses racines dans l'enseignement primaire.
Troisième raison, enfin : c'est à l'école primaire que les inégalités apparaissent, voire se renforcent. C'est d'ailleurs la conclusion des multiples rapports auxquels j'ai fait allusion. À l'arrivée en sixième, le mal est déjà fait. Si nous voulons que l'école exerce à nouveau sa double mission d'élever le niveau d'éducation de la population et de combattre les inégalités, c'est donc bien sur l'école primaire que nous devons faire porter l'essentiel de l'action publique. Il y a là une exigence éducative et économique, mais aussi, tout simplement, humaine et morale.
Le Président de la République, dans le programme qu'il a soumis aux Français lors des dernières élections, a d'ailleurs clairement indiqué la place prépondérante que l'école primaire devait prendre dans le processus de refondation de l'école. Le débat ne porte donc pas sur cette priorité – d'autant qu'elle me semble faire l'unanimité –, mais bien plutôt sur les moyens de satisfaire à cette exigence.