Il serait nécessaire, mais le département judiciaire a toujours été le parent pauvre de la DGSI. De surcroît, ce n'est pas simple : non seulement il faut des policiers qui connaissent le code de procédure pénale, ce qui ne s'obtient pas en claquant des doigts, mais ceux qui, dans la police nationale, posent leur candidature à la DGSI visent le renseignement. La DGSI a recruté 30 personnes que nous avons commencé à former ; 15 iront au pôle anti-terroriste, les autres au secret-défense ou à l'intelligence économique.
Les services les plus débordés sont ceux du parquet anti-terroriste ; en sous-effectif patent, ils traitent un volume d'enquêtes préliminaires sans cesse croissant et n'arrivent plus à remplir leur tâche. Soit on dirige les enquêtes, soit on ne dirige rien ; s'il y en a trop, on ne dirige rien. Or, il faut une harmonisation, et il faut beaucoup de temps pour faire le lien entre les dossiers, pour mener une politique pénale rationnelle, pour analyser ce que l'on met à l'information… Dans les dossiers « syriens », tout est lié : il faut donc, tout le temps, relier ce qui doit l'être, au risque, sinon, d'absurdités, avec des dossiers éclatés entre deux juges d'instruction ou davantage, donnant lieu à des informations judiciaires distinctes – j'ai un cas précis de ce type en mémoire. Ne même plus avoir le temps, parce que l'on est débordé, de se réunir pour faire l'état des dossiers en cours conduit à ces incongruités. Le parquet anti-terroriste doit vraiment être renforcé.
L'instruction doit l'être aussi, mais cela se voit moins car on traite toujours les urgences. Le problème, ce sont les dossiers en jachère, qui stagnent, car nous ne sommes pas assez nombreux pour traiter à la fois le stock et les dossiers nouveaux – et un dossier devient vite « ancien » ! Avant, il y fallait 10 ou 15 ans ; maintenant, c'est 1 ou 2 ans… Le manque d'enquêteurs a un impact sur le traitement de toutes les affaires, y compris celles qui ont particulièrement choqué l'opinion, tel l'assassinat au Mali de deux journalistes de RFI. Nous ne sommes pas assez nombreux pour traiter l'ensemble de ce qui nous échoit ; nous le sommes pour traiter les urgences.