Intervention de Claude Arnaud

Réunion du 24 mars 2015 à 11h00
Commission d'enquête sur la surveillance des filières et des individus djihadistes

Claude Arnaud, maire de Lunel :

Je crois qu'il ne faut pas « charger » la mosquée ; l'imam ou le président de l'association n'y font pas la pluie et le beau temps. En revanche, je pense qu'elle est fréquentée notamment par des groupes radicalisés qui appartiennent à certaines mouvances, et que les choses se passent également à l'extérieur. Je ne crois pas que l'imam, même s'il ne parle pas français, prêche le départ pour le djihad. Une dame, membre de l'équipe municipale, d'origine algérienne et musulmane pratiquante, mais qui ne porte pas le voile, nous a dit avoir été approchée à plusieurs reprises par d'autres dames qui l'ont pressée de questions sur les raisons pour lesquelles elle ne se couvre pas. La mosquée est donc un lieu de rencontre, mais je ne crois pas que ses responsables soient à l'origine de la radicalisation.

J'entretiens avec eux de bons rapports, mais je ne connais pas la teneur des prêches de l'imam, par exemple. Je me suis donc renseigné, il y a quelques années, auprès des gendarmes, qui m'ont dit qu'ils n'avaient pas de remontées particulières. Je crois cependant qu'ils n'en savaient guère plus que moi. Lunel est en zone de sécurité prioritaire ; nous avons donc des échanges réguliers avec la gendarmerie, qui obtient d'ailleurs des résultats, mais elle s'occupe de la délinquance classique. Elle n'est pas missionnée, me semble-t-il, pour s'intéresser à ce volet particulier, même si, aujourd'hui, elle essaie d'en savoir davantage.

Que pourrait-on faire ? De nombreux dispositifs sont en place, mais on peut toujours faire mieux et je ne demande qu'à les développer si je bénéficie de moyens supplémentaires. De par ma formation et ma profession, je suis proche des chefs d'entreprise et attaché à la culture du résultat. Nous pouvons, certes, augmenter le nombre des médiateurs, et nous le ferons, mais c'est une réponse un peu trop facile et à court terme. Il faut agir en amont : ce n'est pas une bonne chose qu'il y ait 20 % de chômage à Lunel. Il revient donc aux élus et à leurs partenaires de promouvoir davantage la création d'emplois. C'est pourquoi nous avons demandé et récemment obtenu la déviation de la nationale afin de désenclaver la zone d'activité économique que nous avons inscrite dans le PLU et de créer de l'emploi. Pour diverses raisons, liées notamment à la situation financière du pays, ce projet avait été enterré, mais j'ai profité des circonstances pour le remettre à l'ordre du jour et, grâce aux financements de l'État, de la région, du conseil général de l'Hérault, les travaux vont pouvoir commencer.

Par ailleurs, je constate des problèmes de parentalité : souvent, beaucoup de ces jeunes sont plus ou moins livrés à eux-mêmes. Il y a quelques années, j'en ai convoqué certains, qui commettaient des incivilités en ville, avec leurs parents afin de leur adresser un rappel à l'ordre à titre préventif. Le père de l'un d'entre eux m'a dit : « Mets-le en prison ! » Il est travailleur et très honnête, mais il élève seul ses enfants, et il a baissé les bras. Or, la ville, l'État, ne peuvent pas tout prendre en charge. Au-delà des mesures en faveur des jeunes, il faut s'intéresser à leur situation familiale, à l'éducation qu'ils reçoivent. C'est ce que nous faisons en mettant en oeuvre des dispositifs d'aide à la parentalité.

1 commentaire :

Le 29/09/2015 à 10:32, laïc a dit :

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"Je ne crois pas que l'imam, même s'il ne parle pas français, prêche le départ pour le djihad." ou encore :

"J'entretiens avec eux de bons rapports, mais je ne connais pas la teneur des prêches de l'imam, par exemple. Je me suis donc renseigné, il y a quelques années, auprès des gendarmes, qui m'ont dit qu'ils n'avaient pas de remontées particulières. Je crois cependant qu'ils n'en savaient guère plus que moi."

Donc, on sait qu'on ne sait rien de ce qu'il se dit dans les mosquées, c'est rassurant !

Or, L'article 35 de la loi de 1905 dit :

"Article 35

Si un discours prononcé ou un écrit affiché ou distribué publiquement dans les lieux où s'exerce le culte, contient une provocation directe à résister à l'exécution des lois ou aux actes légaux de l'autorité publique, ou s'il tend à soulever ou à armer une partie des citoyens contre les autres, le ministre du culte qui s'en sera rendu coupable sera puni d'un emprisonnement de trois mois à deux ans, sans préjudice des peines de la complicité, dans le cas où la provocation aurait été suivie d'une sédition, révolte ou guerre civile."

Donc, comment veut-on appliquer cet article essentiel de la loi de 1905 si les autorités responsables avouent être dans l'ignorance de ce qu'il se dit et se passe dans les mosquées ? Comment appliquer la loi dans ces conditions ?

Et, bien plus, comment reprocher aux citoyens d'être dans l'angoisse de l'islam s'ils ont conscience que les prêches des imams ne sont pas surveillés, et que la loi de 1905 n'est tout simplement pas appliquée dans les mosquées ? La loi, qui est faite pour rassurer le citoyen, pour contribuer à l'ordre et la paix civile, n'est plus en mesure d'accomplir son rôle. Dès lors, le citoyen aura une peur légitime de l'islam et des mosquées, vues possiblement comme des endroits de non-droit, et se tournera naturellement et logiquement vers l'islamophobie, la peur de l'islam, que l'application stricte de la loi devait prévenir et empêcher.

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