Intervention de Isabelle Gorce

Réunion du 9 février 2015 à 14h30
Commission d'enquête sur la surveillance des filières et des individus djihadistes

Isabelle Gorce, directrice de l'administration pénitentiaire :

Que de questions sur les chiffres noirs !

Il existe aujourd'hui des modèles de portables miniaturisés qui ne sont pas détectables par les portiques de détection de masse métallique. Des détecteurs permettent de repérer les appareils dans les cellules, mais seulement s'ils sont sous tension. Nous pensons aujourd'hui que le brouillage est la meilleure des solutions pour éviter l'usage des téléphones portables.

Dès lors que des téléphones sont introduits au sein des établissements, ils sont susceptibles d'être monnayés et nous ne ménageons pas nos efforts pour éradiquer les trafics.

La majeure partie des téléphones provient de projections opérées de l'extérieur. À la suite d'un plan décidé par Mme Taubira en juin 2013, nous avons développé des dispositifs anti-projections dans les cours de promenade. Il reste que les établissements situés en centre-ville ou proches des centres urbains sont particulièrement vulnérables.

L'une des raisons pour lesquelles nous pensons pouvoir lutter plus efficacement contre l'introduction de portables est que le plan récemment mis en place prévoit le déploiement d'équipes légères d'intervention et de sécurité ayant pour mission de sécuriser le périmètre des établissements et de rechercher les appareils jetés par-dessus les murs.

Les trafics se nourrissent aussi des introductions par les parloirs, parfois aussi par les personnels ou les intervenants extérieurs. Des enquêtes de police sont très régulièrement menées pour interpeller les personnes qui commettent des infractions à l'intérieur des établissements.

Regroupement ou séparation, demandiez-vous, monsieur Habib. Nous ne souhaitons pas regrouper les détenus qui posent de véritables problèmes de dangerosité pénitentiaire ou d'ordre public. Nous les gérons comme nous l'avons toujours fait, soit en les laissant en régime normal de détention, où ils font l'objet d'une surveillance particulière, soit en les plaçant en quartier d'isolement, ce qui est le cas de 19 des 172 détenus liés à l'islam radical.

Nous raisonnons en termes de cercles concentriques. Au coeur du cercle, les détenus les plus dangereux : au nombre d'une trentaine, dont vingt sont particulièrement surveillés. Dans un cercle plus large, les détenus radicalisés qui posent des problèmes de prosélytisme : nous souhaitons les regrouper dans des quartiers dédiés pour mieux les contrôler et pour protéger le reste des détenus de leur faculté de nuisance. Enfin, à la périphérie se trouve la masse des détenus plus ou moins vulnérables : nous devons les protéger car ils sont susceptibles d'être exposés au prosélytisme.

Pour ces raisons, il est en effet très important de recruter des imams qui soient capables de comprendre l'attirance de certains détenus pour les thèses fondamentalistes et de contrecarrer ce discours-là car ce n'est pas l'islam apaisé que beaucoup de musulmans en France souhaitent pratiquer. Pour cela, nous avons besoin d'imams mieux formés que ce n'est le cas aujourd'hui. Ils doivent, au-delà de la question de la spiritualité et de l'assistance à apporter aux détenus, être davantage en prise avec la réalité de la population carcérale, composée d'hommes plutôt jeunes venant de cités, susceptibles de revendiquer une forme d'appartenance communautaire et de rechercher une protection à travers un islam radical.

Enfin, vous parliez des taupes, monsieur Habib. Je vous dirai seulement que le renseignement repose sur des informations aussi fournies par des intervenants et des détenus.

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