Intervention de Richard Ferrand

Réunion du 11 juin 2015 à 10h00
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi pour la croissance et l'activité

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRichard Ferrand, rapporteur général :

Nous allons examiner un apport récent du Gouvernement au texte. Il consiste en l'encadrement des indemnités octroyées pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse par les conseils de prud'hommes ou par les cours d'appel. Vos talents de pédagogue, monsieur le ministre, ne seront pas superflus pour faire partager à la commission spéciale le bien-fondé de vos propositions…

Au-delà des indemnités conventionnelles ou légales liées à un licenciement, quand ce licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse, il convient de contingenter la réparation du préjudice que les juges peuvent accorder. Certes, cette pratique est en vigueur partout en Europe dans les pays comparables au nôtre. Il n'en reste pas moins que le licenciement sans cause réelle et sérieuse est réputé illégal et abusif. Le Gouvernement estime qu'il existe un frein à l'embauche qui serait lié à la difficulté de licencier ou, plus exactement, à la cherté du licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse. Il faut admettre qu'il y a là, en l'état de notre droit, comme un oxymore : c'est comme si l'on disait que moins cher sera le divorce et plus il y aura de mariages… (Sourires.)

Le risque existe également de la généralisation d'une sorte de gestion prévisionnelle du licenciement sans cause réelle ou sérieuse – tentation qui, naturellement, ne traversera l'esprit de personne ici... De même, on peut redouter une amputation de la réparation intégrale du préjudice subi par le salarié licencié sans cause réelle et sérieuse.

Ces préventions étant exprimées et appelant des éclaircissements, il faut prendre acte d'un certain nombre d'aspects positifs du dispositif proposé.

Il offre aux deux parties, en premier lieu, une possibilité de prévoir ce qui peut advenir lors d'une séparation dépourvue de cause réelle et sérieuse. On peut aussi admettre que ce dispositif va unifier et homogénéiser la réparation du préjudice là où, aujourd'hui, il peut exister des variations fortes selon les juridictions, voire selon les régions. En outre, établir un barème et un système d'encadrement du montant des indemnités prononcées pour les licenciements dénués de cause réelle et sérieuse, est de nature à renforcer le potentiel de négociation avant contentieux entre les parties.

Dans cette perspective, monsieur le ministre, nous souhaitons nous assurer que les éléments du barème ne seront pas éloignés des décisions constatées à l'heure actuelle, nous assurer également que l'on n'organise pas une régression des droits des salariés. Enfin, nous souhaitons que l'indemnisation du préjudice lié à un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse tienne compte non seulement, certes, de la taille de l'entreprise, mais aussi de l'ancienneté du salarié dans l'entreprise.

Il n'y a de notre part nul procès d'intention, mais la simple volonté d'exprimer franchement nos interrogations, et tout aussi franchement nos éléments d'appréciation positive. En somme, nous souhaitons borner le dispositif afin que, sous couvert d'une simplification bienvenue, il ne soit pas appliqué au détriment des salariés.

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