Cet amendement, qui est la traduction législative de l'une des mesures annoncées par le Premier ministre au début de cette semaine, vise à intensifier la lutte contre les fraudes au détachement afin de garantir aux TPE et aux PME des conditions de concurrence loyale avec les autres entreprises. Il prévoit ainsi de renforcer les mesures administratives et les sanctions à l'encontre des entreprises qui contournent les règles du détachement et de leurs donneurs d'ordre.
Premièrement, lorsque les documents utiles au contrôle de la régularité du détachement, exigibles en langue française, ne sont pas présentés par l'employeur à l'inspection du travail, ce dernier sera passible d'une amende administrative de 2 000 euros au maximum par salarié détaché, dans la limite d'un plafond fixé à 500 000 euros.
Deuxièmement, lorsque les documents et informations permettant de vérifier le respect des règles relatives au droit du travail ne sont pas présentés ou sont volontairement erronés, la procédure de suspension administrative de la prestation de service pourra être appliquée jusqu'à obtention des éléments nécessaires à la réalisation du contrôle.
Troisièmement, lorsque l'employeur de salariés détachés en France ne se conforme pas à son obligation de déclaration préalable de détachement, le maître d'ouvrage ou le donneur d'ordre pourra être rendu responsable de la transmission de la déclaration de détachement à l'inspection du travail. Il s'agit ici d'éviter que les donneurs d'ordre ne fassent porter la responsabilité du travail détaché illégal à leurs sous-traitants, dont il arrive même que l'insolvabilité soit organisée.
Quatrièmement, lorsque l'employeur de salariés détachés en France ne se conforme pas à l'obligation de rémunérer ses salariés au salaire minimum, le maître d'ouvrage ou le donneur d'ordre sera systématiquement tenu, de manière solidaire avec l'employeur des salariés détachés, au paiement des rémunérations. Selon le droit actuel, le maître d'ouvrage ou le donneur d'ordre n'est tenu solidairement au paiement des salaires et charges des salariés que s'il n'a pas formellement enjoint à l'employeur de les payer et s'il n'a pas informé l'agent de contrôle sur les suites données.
Enfin, cet amendement clarifie les composantes du salaire minimum devant être versé par l'employeur étranger à un salarié détaché en France. L'employeur doit non seulement respecter le SMIC, les minima conventionnels et les majorations pour heures supplémentaires, mais également le paiement de tous les accessoires de salaire prévus par les conventions collectives. Actuellement, en effet, les entreprises de BTP étrangères ne sont pas tenues de loger leurs salariés détachés, par exemple, alors que les entreprises françaises en ont l'obligation lorsque leurs salariés travaillent sur un chantier éloigné de leur domicile.
Tels sont les points essentiels de cet amendement, cohérent avec celui que nous avons adopté à l'article 87 D, entre autres. En effet, si l'on estime que le CDI doit être le contrat unique, il faut non seulement lui donner davantage de visibilité, mais aussi lutter contre toutes les formes de précarisation. Nous l'avons fait dans la loi de sécurisation de l'emploi en créant un dispositif de bonus-malus concernant l'intérim et le contrat cours – dispositif sur lequel nous allons du reste continuer à travailler car il ne fonctionne pas de manière satisfaisante –, et nous le faisons également en luttant contre le contournement des règles applicables au travail détaché, qui est un « point de fuite » de notre droit du travail.