Intervention de Corinne Erhel

Réunion du 10 juin 2015 à 16h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCorinne Erhel, rapporteure pour avis :

La proposition de loi du groupe Socialiste, républicain et citoyen que nous examinons aujourd'hui pour avis vise à encadrer le transfert vers les opérateurs de téléphonie mobile des fréquences 694 MHz-790 MHz, dite « bande 700 MHz », actuellement utilisée par les services de télévision. Ce changement d'affectation se fera à la faveur d'une bascule technologique vers la norme vidéo MPEG-4 et de l'arrêt de deux multiplex de diffusion.

L'article 8 prévoit la prise en charge par les opérateurs de télécommunications du coût des réaménagements résultant du transfert des fréquences de la bande 700 MHz.

Quant à l'article 9, il vise à étendre à cette bande la taxe instituée – pour la bande 800 MHz – pour le recueil et le traitement des réclamations des usagers de services de communication audiovisuelle relatives aux brouillages causés par la mise en service des stations radioélectriques.

L'attribution du spectre, qui constitue un bien public, et sa gestion dans le temps, sont un enjeu hautement stratégique aussi bien pour les télécoms que pour la télévision.

Ce texte a vocation à répondre à deux problématiques majeures : d'une part, moderniser la télévision numérique terrestre et développer la télévision en haute définition, tout en garantissant son accès universel et gratuit ; d'autre part, donner aux opérateurs de téléphonie mobile les moyens de faire face à la croissance exponentielle des données échangées.

Il définit ainsi le cadre juridique qui permettra, selon le calendrier arrêté aujourd'hui, de généraliser le recours à la norme MPEG-4, donc la diffusion en haute définition, dès le 6 avril 2016 et de libérer ainsi progressivement les fréquences de la bande 700 MHz. Les fréquences concernées devraient être mises aux enchères à l'automne 2015 sur la base d'un cahier des charges publié par l'ARCEP fin juillet. Leur attribution devrait intervenir à la fin de l'année 2015, leur libération progressive et leur réaffectation aux opérateurs mobiles entre octobre 2017 et juin 2019. En Île-de-France, ce transfert pourrait être anticipé.

Les articles 1er à 7, qui modifient la loi de 1986 relative à la liberté de communication et relèvent de la compétence exclusive de la commission des affaires culturelles, donnent au CSA les moyens d'engager la libération de la bande, tout en apportant un certain nombre de garanties aux acteurs de l'audiovisuel et aux téléspectateurs. Afin de garantir à ces derniers un service continu, il sera essentiel de mettre en place le plus en amont possible un dispositif d'accompagnement permettant notamment aux foyers les plus modestes de bénéficier d'un soutien financier, dans la mesure où il sera nécessaire d'adapter les téléviseurs les plus anciens.

Sur les aspects dont nous sommes saisis, le calendrier, certes restreint, semble toutefois s'inscrire dans une vision d'équilibre entre les différents besoins à court terme des quatre opérateurs mobiles. Ces besoins ne vont cesser de croître. Le trafic mobile, en constante augmentation, devrait ainsi être multiplié par dix entre 2014 et 2019, notamment en raison de la consommation de plus en plus importante de vidéos, dont la part dans le trafic global des mobiles devrait passer de 55 % en 2014 à 72 % en 2019. Au-delà, les perspectives considérables de développement de services et d'applications mobiles innovants à destination de la population et des entreprises sont à même de relancer la croissance et l'emploi.

Alors que la libération de nouvelles fréquences est nécessaire pour accompagner cette croissance, un mouvement international s'est engagé en ce sens. Au niveau européen, la bande dite « 700 MHz » a été identifiée pour répondre à ces besoins dans le cadre du programme politique pluriannuel en matière de spectre radioélectrique de mars 2012. Le processus français s'inscrit dans cette dynamique internationale et européenne.

Par ailleurs, l'affectation de la bande 700 MHz aux opérateurs permettra de dégager des ressources non négligeables qui viendront abonder le budget de l'État et, indirectement, financer l'engagement militaire de la France. Si, comme vous le savez, l'actualisation de la loi de programmation militaire a consacré la budgétisation du financement de la défense, elle prévoyait initialement un financement par des ressources exceptionnelles dont le résultat des enchères de ces fréquences fait partie. Nul ne doute que le produit de ces enchères des fréquences permettra à la défense d'équilibrer son budget.

Avant de conclure, je vous indique que je proposerai à la Commission d'adopter un article additionnel visant à inscrire dans le code des postes et des communications électroniques la nécessité de prendre particulièrement en compte les impératifs d'aménagement du territoire dans le cadre d'une procédure d'attribution des fréquences aux opérateurs mobiles, tant dans le cas qui nous occupe aujourd'hui que dans celui, éventuel, de la future libération d'une bande de fréquences. L'aménagement du territoire est en effet une préoccupation constante de notre Commission.

Moyennant cet ajout, je vous engage à émettre un avis favorable aux articles 8 et 9 de cette proposition de loi.

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