Intervention de Jean-Louis Touraine

Réunion du 6 mai 2015 à 17h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Touraine, député :

Que sont les médicaments biosimilaires ? Je commencerai en disant qu'ils ne sont pas des médicaments génériques. Par rapport au médicament de référence (dit « princeps »), les médicaments génériques ont la même molécule, le même dosage, avec de très faibles possibilités de variation dans ce dosage et dans les excipients.

Apparus à la fin des années 1970, les médicaments biologiques, appelés également biomédicaments, sont issus des biotechnologies à partir de cellules vivantes. Quelque 80 % des nouveaux médicaments sont maintenant fabriqués avec ces technologies : anticorps monoclonaux, facteurs de croissance, insuline… Ces molécules ne peuvent cependant être reproduites exactement à l'identique avec une nouvelle chaîne de fabrication. Ces nouveaux médicaments représentent 20 % de la dépense totale des médicaments dans le monde ; ils devraient en représenter la majorité à terme. Le coût de développement (recherche et processus de production) et le prix d'un biomédicament sont beaucoup plus élevés que ceux d'un médicament chimique. En France, sur les dix médicaments les plus coûteux utilisés à l'hôpital, sept sont des biomédicaments. Il s'agit donc d'enjeux financiers très importants. Ils constituent des avancées majeures pour lutter contre des maladies chroniques graves ou invalidantes telles que certains cancers, les déséquilibres thyroïdiens, les insuffisances rénales, l'hématologie ou encore le diabète. Ces médicaments sont particulièrement utilisés dans la médecine personnalisée ou ciblée.

Au cours des cinq prochaines années, un grand nombre de brevets tombera dans le domaine public. Ainsi l'insuline antidiabétique Lantus, produite par le laboratoire Sanofi, est tombée hier dans le domaine public ; le laboratoire Lilly envisage la production d'un biosimilaire dans son usine alsacienne à partir de 2016. D'ores et déjà, de nombreux laboratoires pharmaceutiques développent et mettent sur le marché des médicaments biosimilaires, sur le même schéma que les génériques pour les médicaments chimiques. Il s'agit donc d'un enjeu majeur d'un point de vue économique et pour les comptes sociaux. Les régimes d'assurance maladie attendent des économies substantielles de cette interchangeabilité.

L'article 47 de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2014 donne la possibilité au pharmacien de substituer un biosimilaire à un biomédicament de référence, à la condition de respecter trois conditions principales : la substitution est réalisée en initiation de traitement et de manière à garantir la continuité du traitement avec un même médicament ; le médecin prescripteur n'a pas exclu la substitution ; lorsqu'il substitue, le pharmacien inscrit le nom du médicament sur l'ordonnance et en informe le prescripteur. Un décret d'application encore à venir doit préciser les modalités de la substitution et de la procédure de création d'un répertoire des biosimilaires. Aucun autre pays européen n'a encore instauré de système de substitution de la prescription du médecin par le pharmacien. Certains pays même l'ont interdit. Tous nous observent.

L'objectif de l'audition publique était de discuter des modalités selon lesquelles un biosimilaire pourrait être amené à remplacer un biomédicament de référence, avec les mêmes exigences en termes d'efficacité, de qualité et de sécurité.

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