Mais il n'y a pas de pouvoir judiciaire en France ! La Constitution parle de l'autorité judiciaire et, compte tenu de la manière dont sont nommés les magistrats et dont est décidé le budget dont ils disposent, on ne peut parler de pouvoir judiciaire, puisque celui-ci est à la fois défini par le pouvoir de nommer les magistrats et par la capacité à décider de son budget. Sous cet angle, d'ailleurs, la Cour des comptes et le Conseil d'État constituent des formes de pouvoirs judiciaires : le premier président de la Cour des comptes a des moyens de rétorsion tellement puissants qu'on ne peut lui refuser des crédits ! Et le vice-président du Conseil d'État a des pouvoirs bien supérieurs encore… S'il demande pour ses auditeurs des ordinateurs neufs, modernes et coûteux, il les obtiendra. Faites un tour en revanche au tribunal pour enfants de Paris, et regardez avec quel matériel travaillent les juges, observez le nombre de greffiers absents et non remplacés : c'est une honte, un scandale ! Cette justice repose sur la conscience professionnelle et morale de magistrats, de greffiers et d'employés qui ne comptent pas leur temps parce qu'on ne laisse pas repartir une mère et son enfant qui ont attendu dans un couloir, pour ne les recevoir que deux mois plus tard.
C'est une situation très grave, mais qui ne concerne que de pauvres gens, les plus pauvres parmi les pauvres. Sans parler de la férocité des poursuites pénales à l'encontre des jeunes, qui n'a d'égale que l'indulgence à l'égard des grands fraudeurs. Ils sont assez peu nombreux devant les tribunaux, les sexagénaires qui font la navette entre Paris et Genève ou Bruxelles pour voler au fisc des centaines de millions d'euros, alors qu'on poursuit des petits artisans pour 43 000 euros de dettes accumulés en quinze ans de travail. Cette terrible vérité, je me reproche de ne pas l'avoir vue plus tôt, depuis la Cour des comptes ou le ministère de l'intérieur.