Intervention de Denis Baranger

Réunion du 12 juin 2015 à 9h00
Groupe de travail sur l'avenir des institutions

Denis Baranger :

Monsieur le ministre, je ne serai certainement pas le seul ici à vous exprimer ma profonde reconnaissance pour la manière dont, dans toutes vos interventions publiques et vos ouvrages, et ce jour encore, vous énoncez des choses vraies, mais en général non dites, ou sous-estimées, sur l'état de la justice et sur d'autres aspects des affaires publiques, et dont vous élevez au rang de principes les conclusions que vous en tirez. C'est, je crois, la grande contribution de vos écrits à la vie publique et à l'opinion.

Dans cette matière des principes, qui ne peut que préoccuper un groupe de travail comme le nôtre, permettez-moi de vous interroger sur deux points.

Dans la conclusion de votre ouvrage Soif de justice, que vous avez bien voulu nous adresser, vous en appelez à une révision de l'article 64 de la Constitution. « Le Président de la République est garant de l'indépendance de l'autorité judiciaire » : quand une Constitution a dit cela, elle a tout dit ; cette rédaction résume toutes les difficultés présentes du statut constitutionnel de l'ordre judiciaire. Vous l'avez rappelé, et d'autres intervenants après vous.

En premier lieu, qu'est-ce qui a jusqu'alors empêché de réviser cette disposition à l'évidence problématique, qui place la fonction juridictionnelle en France sous l'autorité du chef de l'exécutif et de l'État ? Les formulations de principe ne sont pourtant pas difficiles à modifier, même si changer la réalité est une autre affaire. Pourquoi cet article 64 reste-t-il l'exact reflet de l'état de notre ordre judiciaire dans ce qu'il a de malencontreux ?

Ensuite, comment conviendrait-il de le réécrire ? Vous avez cité la formule assez opportune de la loi fondamentale allemande. Faudrait-il s'en inspirer ? Devrait-on parler directement et courageusement de « pouvoir judiciaire » dans la Constitution française ?

Par ailleurs, dans l'un de vos précédents livres, Cas de conscience, comme dans la conclusion de Soif de justice, vous vous montrez plutôt réservé, voire parfois critique, vis-à-vis de l'action du Conseil constitutionnel, dont vous avez été membre de 2001 à 2010. Que faudrait-il faire selon vous pour que cette institution joue un rôle plus positif en matière de libertés ? En somme, pourriez-vous étendre au Conseil constitutionnel le raisonnement que vous avez conduit devant nous sur les juridictions françaises et la justice en France ?

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