Il est exact que la Cour européenne des droits de l'homme qualifie les membres du parquet de « magistrats », et non pas de « juges », en raison de cette dépendance vis-à-vis du garde des sceaux. Partant de là, on peut effectivement imaginer de couper le lien entre le ministre et le parquet, et considérer que le procureur peut devenir, en quelque sorte, le rapporteur public que l'on connaît dans les juridictions administratives ou au Conseil d'État. On peut imaginer aussi d'interdire au parquet d'intervenir dans des affaires qui concernent les élus ou les hauts fonctionnaires, lesquelles exigent une totale indépendance, afin de limiter les conflits d'intérêts. On peut considérer enfin que l'information relève de la justice, du pouvoir judiciaire, et non plus du pouvoir politique. Serait-il choquant que le garde des sceaux s'interdise toute communication, même lorsqu'il est interrogé sur ces affaires ? C'est le cheval de Troie par lequel on peut, selon les systèmes politiques ou les alternances, remettre en cause l'indépendance de la justice.
Dans l'esprit de l'éthique mise en avant par la garde des sceaux, les questions de déontologie nous préoccupent au premier chef, et nous devons nous interroger sur celle des magistrats. Si nous nous orientons vers une véritable séparation des pouvoirs – politique, judiciaire et législatif –, il faut que le pouvoir judiciaire réponde aux mêmes exigences que celles qui s'imposent aux élus et à l'exécutif. Voilà pourquoi nous travaillons sur les déclarations d'intérêts. Mais nous nous heurtons au fait que, de par la Constitution, le CSM ne peut pas prendre cette question en considération, car elle n'appartient pas à son domaine de compétence. Qui va juger du respect de cette déontologie ? La Haute Autorité ? Mais que devient, dans ce cas, l'indépendance ? Le CSM ? Il me semble que ce serait la meilleure solution, mais nous n'avons pas la majorité requise pour accroître son domaine de compétence. Que suggérez-vous ?