Ainsi que je l'avais indiqué en première lecture, les constats sur l'état actuel de notre système d'accueil font l'objet d'un certain consensus. Plusieurs rapports, notamment celui que Jeanine Dubié et moi-même avons rédigé, ont permis de révéler les failles que constituent des carences manifestes, des délais de traitement de plus en plus longs, des coûts budgétaires croissants, et une difficulté flagrante à faire face à une hausse constante de la demande. Ces failles nécessitent une réforme en profondeur du système d'asile afin d'accueillir dignement et efficacement ceux qui en ont réellement besoin.
À l'issue de nos débats en première lecture, le groupe Union des démocrates et indépendants s'était félicité d'un certain nombre d'avancées : la réorganisation du premier accueil, avec la simplification du parcours du demandeur d'asile et, à terme, la création d'un « guichet unique » ; l'amélioration de l'application des procédures accélérées, même si son application a été limitée plus qu'elle n'aurait dû l'être, en commission et en séance ; la garantie d'un hébergement et d'un accompagnement adaptés aux demandeurs d'asile, avec notamment l'instauration d'un schéma national d'hébergement, et la « familialisation » de l'allocation temporaire d'attente.
Tout au long des débats, nous avons veillé à ce que l'équilibre du texte initial soit préservé. Si nous n'avons pas été satisfaits sur tous les points, l'examen au Sénat a permis d'apporter quelques améliorations, en retenant certaines de nos propositions. L'Office pourra ainsi mettre fin au statut de réfugié qu'il a accordé si la présence de la personne concernée constitue une menace grave pour le pays. Le Sénat a instauré une obligation, et non pas une simple faculté, pour l'OFPRA de mettre fin au bénéfice de la protection subsidiaire lorsque les circonstances ayant justifié l'octroi de cette protection ont cessé d'exister ou ont connu un changement significatif. Il a aussi rétabli le délai prévu par le projet de loi initial, allongé par l'Assemblée nationale, à l'expiration duquel l'autorité administrative pourra estimer une demande comme tardive. Il a enfin prévu que la domiciliation du demandeur d'asile ne constituera plus une condition préalable à l'enregistrement de sa demande.
Pour autant, certaines améliorations peuvent encore être apportées. Tel est le sens des amendements que je défendrai en commission, afin notamment de redonner du sens à la procédure d'asile à la frontière en prévoyant que le juge des libertés et de la détention ne peut en aucun cas ordonner la libération d'un étranger en zone d'attente sur le seul fondement de l'existence de garanties de représentation. Il s'agira aussi de renforcer la professionnalisation de la CNDA en prévoyant la présence d'un rapporteur nommé parmi les personnels de la Cour. Je proposerai également de créer un système d'information et de suivi de la situation des demandeurs d'asile – mon amendement sur le sujet n'est pas parfait, mais le principe mériterait d'être inscrit dans la loi. Un amendement visera à mettre en place un lieu unique régional d'accueil des demandeurs d'asile.
Je souhaite enfin améliorer le processus d'insertion des demandeurs d'asile. Dans ce cadre, il s'agira de prévoir que l'attestation de demande d'asile vaut autorisation de travailler – je sais que l'opinion publique ne nous suit pas toujours sur le sujet, mais nous sommes convaincus qu'il s'agit d'une piste à explorer –, mais également de garantir et d'inscrire dans la loi l'orientation prioritaire en centre d'accueil de demandeurs d'asile (CADA), ainsi que de rattacher les lieux d'hébergement d'urgence aux missions d'urgence telles que définies par le code de l'action sociale et des familles. Les associations qui viennent en aide aux populations concernées m'ont rapporté qu'elles n'avaient même pas été prévenues que certaines des personnes qui ont été délogées de la porte de la Chapelle ce mois de juin, et parmi lesquelles on ne trouvait pas que des demandeurs d'asile, seraient envoyées dans les départements d'Île-de-France.
Pour conclure, madame la rapporteure, je vous félicite pour la qualité de votre travail et la manière dont vous avez orchestré des débats difficiles, non seulement entre la majorité et l'opposition, mais aussi au sein de votre majorité. Il est dommage que nous n'ayons pas pu trouver un accord avec le Sénat. Pour avoir participé aux travaux de la commission mixte paritaire, je sais que vous avez tout tenté pour y parvenir, mais trop de divergences persistaient entre nos deux chambres. Nous abordons en tout cas ces débats de nouvelle lecture dans d'excellentes dispositions.